“Un Pays qui se tient sage” de David Dufresne. Ou comment réfléchir la violence policière

Sorti cette semaine au cinéma, Un Pays qui se tient sage, le film documentaire sur les violences policières du journaliste David Dufresne, doit son titre à une vidéo tournée par un policier à Mantes-la-Jolie en décembre 2018. Elle mettait en scène des lycéens agenouillés, mains sur la tête ou menottés, tandis qu’on entendait le membre des forces de l’ordre commenter : « Voilà une classe qui se tient sage. » Un collègue renchérissait : « Je pense qu’ils ont jamais vu ça. » Tournée au smartphone, mise en ligne comme un trophée, la vidéo provoquait finalement une vague d’indignation. Pour David Dufresne, la scène sonnait comme un avertissement et un appel à riposter. Et son documentaire construit autour de vidéos des violences policières – qui sort en même temps qu’un livre collectif, Police (La Fabrique Éditions), auquel il a contribué aux côtés de Frédéric Lordon ou de Julien Coupat –, se présente comme une réponse en forme de dispositif cinématographique mais aussi politique.

La bande-annonce du film Un pays qui se tient sage (en salles), de David Dufresne.

Alors que la police et l’État continuent d’invoquer le « monopole de la violence légitime » au sens de Max Weber, qui permettait de justifier la violence qui tombe d’en haut, tout se passe comme si, avec ces vidéos, nous étions les contemporains d’un renversement, où les citoyens se mettent à surveiller ceux qui les surveillent – ce que le scientifique canadien Steve Mann a appelé la « sousveillance ». Or l’intérêt du film de Dufresne est de se saisir de ces images pour les monter dans un dispositif réflexif et égalitaire inspiré de Deleuze, où toutes les voix, les corps et les pensées des parties en présence sont rassemblées. Le philosophe Ollivier Pourriol, qui est allé voir le film, nous en propose un décryptage. 

Les séances pour Un Pays qui se tient sage, de David Dufresne.