Le peuple, ce héros
Une même problématique traverse le film V comme Vendetta et l’agitation politique du Népal : une dictature peut-elle s’imposer à un peuple qui a connu la démocratie ? Regards croisés.
La BD d’Alan Moore, V for Vendetta, tout comme le film éponyme sur les écrans cet hiver, est une fable sur la démocratie (1). La première visait l’Angleterre thatchérienne ; le second est une attaque transparente contre la dérive impériale de l’Amérique de George W. Bush. Dans une Angleterre postnucléaire, un héros masqué affronte une dictature, un peu pour se venger, beaucoup pour réveiller la mémoire d’une population anesthésiée par des médias complaisants. Ce bref argument recèle deux idées fortes qu’est venu illustrer au même moment un clin d’œil de l’histoire, la révolution népalaise. La démocratie fonctionne comme une mémoire : une fois instituée, elle s’endort parfois, mais ne meurt pas. Et si tout récit a besoin d’un héros, en politique, le peuple est le seul héros qui agit.
L’effet de « cliquet démocratique » est la grande idée d’Alexis de Tocqueville. Ce dernier observe que la démocratie américaine est d’autant plus profondément enracinée qu’elle procède d’une démocratie des mœurs et non des institutions. L’existence d’un sentiment démocratique immanent au corps social fonde et entretient la démocratie politique, laquelle ne peut être durablement fondée d’en haut, par une Constitution, comme l’a montré en France la Terreur succédant à la Convention (2). Cette observation est réversible. Chez les peuples auxquels le passage du temps et les circonstances historiques ont offert des mœurs démocratiques à l’échelle d’une génération, l’idée de liberté a fait son nid. Cette expérience-là peut s’oublier momentanément, comme dans l’Angleterre de V for Vendetta ou l’Amérique de Bush, mais elle ne saurait disparaître. Alexis de Tocqueville l’énonce ainsi : « À mesure que j’examine de plus près les besoins et les instincts naturels des peuples démocratiques, je me persuade que, si jamais l’égalité s’établit d’une manière générale et permanente dans le monde, les grandes évolutions intellectuelles et politiques deviendront bien difficiles, et plus rares qu’on ne le suppose. » (3)
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