Sauver la liberté d’expression

Une recension de Pierre Terraz, publié le

La parole fait mal. Pire encore, elle tue. Mais faut-il pour autant laisser les apprentis censeurs définir ce qu’il faudrait taire ou non ? Si Monique Canto-Sperber plaide pour une philosophie des limites, elle la veut sobre, collant au plus près des délits en évitant à tout prix la censure préventive. Car, en fin de compte, accorder une voix aux idées même les plus choquantes pour les décrédibiliser publiquement serait bien plus efficace qu’une vaine croisade idéologique contre les fanatiques de la parole. Cet essai part d’un constat effarant : le concept de liberté d’expression, tel qu’on l’entend aujourd’hui, a été forgé entre le XVIIe siècle et la fin du XVIIIe. Comment alors pourrait-il être adapté à notre société contemporaine régie par les réseaux sociaux et par un multiculturalisme nouveau où chacun veut faire valoir son point de vue ? L’urgence est d’actualiser, de « mettre à jour » la définition même de la liberté d’expression. Pour cela, la philosophe formule quelques solutions radicales… sans vraiment expliquer comment elles seraient négociables : forcer les réseaux sociaux à révéler une identité derrière un pseudonyme quand le propos devient délictueux, ou encore sortir du principe d’autorégulation auquel ont droit ces plate­formes, en les soumettant à des lois plus responsabilisantes. Plutôt qu’une proposition concrète, cet essai tente surtout de redonner un sens profond et contemporain à la liberté du verbe.  

Sur le même sujet

Le fil
3 min
Cédric Enjalbert

L’humanité n’a jamais autant pris la parole et, pourtant, on s’écoute de moins en moins – la preuve avec les débats parlementaires sur la réforme des retraites…

Paroles, paroles, paroles…