Roger Berkowitz (2/2) : “C’est sur le plan politique qu’il faut battre Trump, pas sur le plan légal”

Parmi les différents procès en cours contre Trump, certains pourraient-il aboutir ?

Roger Berkowitz : Le procès en Géorgie est le plus susceptible de déboucher sur une condamnation. Il faut dire que dans ce cas, Donald Trump a été enregistré en train d’insister lourdement pour qu’un responsable républicain fabrique des votes fictifs. Mais les autres affaires sont moins évidentes, même si Trump est très certainement coupable de toutes les charges qui sont retenues contre lui dans chacun de ces procès. Prenons l’accusation la moins grave. L’État de New York lui reproche d’avoir gonflé le prix de ses avoirs immobiliers pour tromper le fisc et les banques. Ce n’est certes pas bien. Mais d’après nombre de mes amis qui travaillent dans l’immobilier, c’est une pratique très courante et on n’a jamais vu personne poursuivi en justice pour de tels actes. Difficile donc de ne pas penser qu’il s’agit d’un procès politique. Ensuite, il y les documents classifiés que Trump a emportés avec lui après sa présidence. Mais ses prédécesseurs, Biden et Cheney, l’ont fait aussi. Certes avec Trump, c’est plus massif, clairement établi et plus intentionnel aussi. Là aussi, il est coupable pour autant que je sache. Mais avez-vous réellement besoin de le poursuivre pour avoir emporté des documents ? Ici aussi, pourquoi le poursuivre lui et pas les autres… Il y a à nouveau le soupçon d’un motif politique.

“Nous avons connu des candidats qui se sont présentés depuis la prison. Nous avons des criminels qui ont servi le Congrès depuis leur prison. Et jamais nous n’avons empêché un candidat de se présenter à une primaire” Roger Berkowitz

Pourquoi le troisième procès, celui en Géorgie, est-il le plus grave, selon vous ?

Trump est poursuivi pour avoir incité le secrétaire d’État de Géorgie à trouver 10 000 votes inexistants en sa faveur lors de la dernière élection présidentielle. L’appel où il formule cette demande a été enregistré. C’est indubitable. Enfin, il y a sa contribution à l’insurrection du 6 janvier, qui lui vaut une interdiction par la Cour suprême du Colorado de participer aux primaires, en vertu d’un alinéa du 14^e amendement qui visait à interdire aux anciens confédérés d’obtenir une charge publique après la guerre de Sécession. Mais il n’a jamais été utilisé depuis. Pour moi, ce sont ces deux procès-là qui sont les plus justifiés. Or malgré tout, si j’avais été Biden, j’aurais été enclin à le pardonner [lire la première partie de notre entretien sur ce point].