La France est-elle devenue un pays “ingouvernable” ?
Le terme est sur toutes les lèvres depuis l’élection dimanche dernier d’une nouvelle Assemblée nationale dont il ne se dégage aucune majorité claire. Mais que signifie-t-il vraiment ? Comment en arrive-t-on à une situation d’ingouvernabilité ? Dans son ouvrage La Société ingouvernable (La Fabrique, 2018) le philosophe Grégoire Chamayou décrit la manière dont les revendications sociales qui parcourent la société provoquent des situations d’ingouvernabilité, c’est-à-dire de blocage. Il montre surtout que ces blocages dans le fonctionnement de nos démocraties ont des causes politiques plus profondes que les seules élections. Analyse.
De la gouvernabilité à l’ingouvernabilité
Nous sommes plongés depuis quelques jours dans une situation politique nouvelle d’ingouvernabilité. Du moins que le pays ne peut pas continuer à être gouverné comme il l’a été ces cinq dernières années. Le pouvoir exécutif ne dispose plus de majorité absolue à l’Assemblée pour appuyer sa politique, et ne peut donc plus diriger l’action publique comme il l’entend. Pour le faire, il lui faudra trouver des soutiens parmi ses opposants, qui ne semblent pas disposés à lui faciliter la tâche. Les commentateurs politiques ont donc raison de parler d’« ingouvernabilité » du pays.
Mais l’ingouvernabilité n’est pas seulement un fait institutionnel. Elle correspond à une réalité politique plus générale. C’est l’idée que défend Grégoire Chamayou dans son ouvrage La Société ingouvernable : depuis plusieurs décennies, de nombreuses révoltes parcourent les individus et la société, qui les conduisent à fragiliser le pouvoir et à l’empêcher de les gouverner. Cette réflexion se fonde sur les personnes elles-mêmes plutôt que sur les institutions, car on parle bien de gouverner des personnes. C’est ce que Chamayou nomme la « gouvernabilité » : « Le terme désigne en ce sens une disposition interne à l’objet qu’il s’agit de conduire, sa propension à se laisser diriger, la docilité ou la ductilité des gouvernés. » À l’inverse, c’est lorsque que les sujets politiques refusent de se placer dans ce rapport de subordination que l’on peut parler de bascule dans une position d’ingouvernabilité : « L’ingouvernabilité se conçoit dès lors symétriquement comme une contre-disposition rétive, un esprit d’insubordination, un refus d’être gouverné, du moins “pas comme ça, pas pour ça, pas par eux”. » Mais, explique Chamayou, l’ingouvernabilité peut aussi venir du sommet, lorsque le système pris dans ses propres contradictions ne parvient plus à gouverner [comme lors de la célèbre crise politique belge de 2010-2011, où le blocage entre partis était tel qu’il aboutit à 250 jours sans gouvernement]. C’est la combinaison des deux phénomènes qui crée une situation de tension extrême, pouvant mener jusqu’à une révolte populaire.
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