Grégoire Bignier : “L’architecture à venir est une ‘œuvre de conciliation’ entre la biosphère et l’activité humaine”
En Laponie suédoise, l’on peut séjourner dans une chambre d’hôtel baptisée « Biosphère », dans le complexe Treehotel, c’est-à-dire dans une cabane de bois perchée dans la canopée d’une forêt et entourée de 350 nichoirs à oiseaux. Mais peut-on réllement concilier habitat humain et environnement ? La réponse nuancée de l’architecte Grégoire Bignier.
Le projet de cabane-nichoirs propose de faire cohabiter touristes et oiseaux, au sein de l’habitat naturel de ces derniers – la forêt. Est-ce à quoi pourrait ressembler une architecture de la cohabitation ?
Grégoire Bignier : Il faut d’abord dire quelques mots sur les porteurs du projet. Il s’agit de l’agence danoise BIG, qui occupe une place très particulière dans le panorama puisqu’elle propose depuis quelques années des projets, certes spectaculaires, mais qui sont loin de passer pour écologiques. Cette agence a notamment été désignée pour réaliser le projet (finalement annulé) d’Europa City, ce centre commercial gigantesque qui devait être construit sur des terres fertiles au nord de Paris. BIG s’inscrit sans conteste dans une approche entrepreneuriale de l’intégration des questions écologiques en architecture. Le projet de nichoirs autour de la cabane en est un prolongement. Je suis tenté d’y voir une promesse similaire à celle de « nager avec les dauphins », reformulée dans le langage de l’ère du temps : ici, l’oiseau, symbole d’une faune de proximité, a remplacé la figure du dauphin comme animal du monde sauvage. On reconduit l’idée d’une nature idéale, où les oiseaux vivent dans les arbres. Je n’ai a priori rien contre ce projet, avant tout car il me paraît assez anecdotique et sans incidence sur la biodiversité. Reste qu’il est louable, et même nécessaire, que les architectes s’emparent de la question de la biodiversité, qu’ils portent un nouveau regard sur les espaces qu’ils prennent en charge, et participent en retour à la conversion de regard chez les utilisateurs de ces espaces. Toutefois, traduire une idée philosophique en termes architecturaux peut donner lieu à des dispositifs qui n’en sont plus que la forme réifiée, et n’ont sur le terrain aucune effectivité.
“Traduire une idée philosophique en termes architecturaux peut donner lieu à des dispositifs qui n’en sont plus que la forme réifiée, et n’ont sur le terrain aucune effectivité”
Alors que sous l’égide d’Anne Hidalgo, l’actuelle équipe de la mairie de Paris cherche à transformer durablement la capitale, par de grands…
Critiquée pour sa gestion de l’urbanisme, la ville de Paris va se doter d’un « manifeste pour la beauté ». Mais peut-on vraiment se…
Le concept d’« écofascisme », né dans les années 1970, s’impose de plus en plus dans le paysage de la pensée écologique. Souvent confus,…
En 2021, en France, les éoliennes sont toujours loin de faire l’unanimité. Malgré le projet de défense de la nature qu’elles soutiennent a priori,…
Comment la révolution du télétravail, les nouveaux modes de vie urbains ou encore le culte du sport vont-ils reconfigurer nos villes ? Pour…
Opposée à la culture, la nature (mot issu du latin nascor : naître) est une notion fortement équivoque qui décrit à la fois un processus et un résultat, l’essence des choses et le monde qui les entoure (appelé alors : Nature,…
À la fin du XXe siècle, Michel Serres prend la mesure d’un événement métaphysique sans précédent : le passage à l’Anthropocène. Bombe atomique, déchets nucléaires, industrie polluante, exploitation intensive des ressources……
L’activité humaine altère plus vite, profondément et durablement que jamais l’environnement qui, en retour, affecte les conditions d’existence des…