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François Cusset © Jean-Luc Bertini/Pasco&co - Nathalie Heinich © Francesca Mantovani/Gallimard opale.photo

Dossier / “Il faut qu’on parle !”

François Cusset-Nathalie Heinich : désaccords majeurs

François Cusset, Nathalie Heinich, propos recueillis par Alexandre Lacroix publié le 01 juin 2023 12 min

Lorsqu’on n’est d’accord sur rien, peut-on se parler quand même ? Pour le savoir, nous avons réuni la sociologue Nathalie Heinich et l’historien des idées François Cusset. La première déplore la montée du communautarisme dans l’Université avec son récent pamphlet : Le wokisme serait-il un totalitarisme ? (Albin Michel). Le second voit dans cette critique une manifestation de La Haine de l’émancipation, selon le titre du « Tract » qu’il vient de publier chez Gallimard. Ce dialogue était d’autant plus difficile à nouer que Nathalie Heinich a fait paraître une critique au vitriol du texte de François Cusset sur le site de l’Observatoire du décolonialisme. Mais dialoguer n’est pas publier en ligne, cela exige de confronter les arguments. Voilà qui est fait !

 

Qu’attendez-vous de cet échange ?

Nathalie Heinich : J’ai la curiosité de savoir s’il est possible d’échanger de véritables arguments qui ne soient pas des invectives, ce qui est malheureusement la tendance de notre époque.

 

François Cusset : Je suis un peu sceptique sur la possibilité qu’il en sorte quelque chose. Le seul avantage que j’y vois, c’est que la spontanéité de la parole court-circuite les stratégies rhétoriques qui se déploient dans l’espace médiatique, notamment sur le Web, de façon idéologique et polarisée.

 

N. H. : D’après mon expérience, il est peu probable qu’un dialogue de ce type modifie nos positions respectives. Il n’est même pas certain que cela permette une meilleure compréhension mutuelle ! Cependant, il peut être utile d’expliciter nos divergences aux yeux des tiers, pour le public, les lecteurs…

F. C. : Lesquels ont eux-mêmes des opinions déjà forgées avant de lire et auront tendance à choisir l’interlocuteur dont ils se sentent le plus proches.

 

N. H. : Là, je serais plus mesurée, il y a aussi des sujets sur lesquels bien des gens hésitent. C’est à ceux-là que j’ai envie de m’adresser.

“Qu’il y ait aujourd’hui un déplacement des sensibilités sur les questions du genre ou de la race, c’est certain. Que cela prenne une forme monolithique relève d’une déformation délibérée à des fins politiques”
François Cusset

 

En cas de désaccord, une méthode pour avancer consiste à clarifier les termes du débat. En l’occurrence, vous n’avez pas la même compréhension du mot « wokisme ». Pour vous, François Cusset, il ne désigne pas une réalité mais un fantasme.

F. C. : En effet, il y a un problème de délimitation de l’objet. À quoi renvoie ce soi-disant wokisme ? Ceux qui emploient le terme, en général pour s’y opposer, ont tendance à y mettre à la fois les études de genre, la pensée décoloniale, les luttes féministes, le mouvement LGBT, parfois aussi l’écologie radicale, voire des revendications venues de l’islam politique. Qu’il y ait aujourd’hui, notamment dans la nouvelle génération, un déplacement des sensibilités sur les questions du genre ou de la race, c’est certain. Que cela prenne une forme monolithique, révèle une idéologie, au singulier, est tout à fait inexact ou, plutôt, relève d’une déformation délibérée à des fins politiques – le suffixe « -isme » dit bien qu’on est dans la dénonciation idéologique.

“Derrière la diversité des causes défendues, il y a une unité profonde, ce que j’appelle l’“identitarisme”. Le “wokisme” repose sur l’assignation des individus à des communautés d’appartenance”
Nathalie Heinich

 

N. H. : J’ai une réponse à la fois sur le terme et sur le contenu. Sur le terme, je tiens quand même à affirmer que le mot « woke » existe, a un large usage dans la population américaine depuis le mouvement Black Lives Matter et qu’il entre de surcroît en résonance avec la théologie de l’éveil répandue dans le protestantisme américain. Donc, nous n’avons pas affaire à une création de toutes pièces à des fins de stigmatisation… Sur le contenu, j’ajoute que derrière la diversité des causes défendues, il y a une unité profonde. Le trait commun tient à ce que j’appelle l’« identitarisme ». Le wokisme repose sur l’assignation des individus à des communautés d’appartenance qui se définissent par les discriminations subies : femmes, personnes de couleur, homosexuels et trans, Arabes ou Noirs, musulmans, voire obèses ou handicapés… Tout cela est propre à la tradition anglo-américaine du multiculturalisme, qui tend à opposer les êtres en fonction d’appartenances communautarisées.

 

F. C. : Le terme « woke » est en effet lié aux théologies de l’éveil, très actives sur le sol américain à partir du XVIIIe siècle. Mais si le mot woke ou l’expression stay woke ont bien été employés par les Afro-Américains, par beaucoup d’autres aussi, nul ne se revendique du wokisme, terme de polémistes d’extrême droite. Quant à l’identité, ici, c’est un problème, un fardeau, une assignation, pas une idéologie, et un « -isme » de plus.

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