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 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
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© Olivier Marbœuf pour PM

Biographie

Tolstoï. Les vertiges de l’âme

Cécilia Bognon-Küss publié le 27 octobre 2010 9 min

« Je suis laid, maladroit, sale et mal éduqué au sens mondain de ce mot. Je suis irascible, fastidieux aux autres, immodeste, intolérant et timide comme un enfant. Je suis, autant dire, un rustre », écrit Tolstoï en 1854, alors qu’il n’est pas encore l’écrivain le plus célèbre de Russie. La sévérité du regard qu’il porte sur lui-même n’a d’égal que le plaisir narcissique qui accompagne ces fustigations intempestives. Alors que la lucidité coïncide chez lui avec la mauvaise foi, « la grande âme de la Russie », selon Romain Rolland, découvre ses failles et ses contradictions. Du jeune aristocrate arriviste, joueur, et tiraillé par la chair, au vieux comte puritain, vêtu comme un moujik, habité par la culpabilité et la tentation du renoncement, la figure de Tolstoï éclate en de multiples tendances. Au-delà des contradictions qui déchirent la conscience de l’écrivain, du pédagogue, de l’anarchiste ou du mystique, se découvre un humanisme teinté de désespoir.

Lev Nikolaïevitch Tolstoï est né le 28 août 1828 dans la riche propriété de Iasnaïa Poliana, non loin de la ville de Toula, à quelque 200 kilomètres de Moscou. Orphelin de mère à 23 mois, Tolstoï portera jusqu’à sa mort la trace de cette disparition prématurée. Malgré cette absence fondatrice, ses premières années lui apparaissent rétrospectivement comme un âge d’or perdu : « Quelle époque peut être supérieure à celle où les deux meilleures vertus, la joie innocente et le besoin illimité d’amour, sont les seuls ressorts de la vie ? », s’interroge-t-il dans la nouvelle Les Mémoires d’un fou. Enfants, Léon et ses frères s’inventent une « fraternité des fourmis » qui détient le secret de la félicité des hommes, explorent le parc de Iasnaïa Poliana, se déguisent en ours avec les moujiks du domaine et apprennent le français avec la bonne tante Toinette. Tandis que la famille a déménagé à Moscou pour parfaire l’éducation de la fratrie, le père décède brutalement. Rebuté par les études et peu à l’aise avec son physique, Léon se livre à des examens de conscience permanents, méditant sur son caractère, sur la destinée de l’homme ou la désagrégation de la matière.

 

Un portrait de Rousseau autour du cou

Envoyé à Kazan en 1841, il s’imagine diplomate et prépare l’examen de la faculté des langues orientales. Pour l’heure il se compose des règles de vie dérisoires au regard de celles qui gouverneront plus tard son existence : parler français avec un accent parfait, avoir les ongles longs et bien taillés, adopter un air permanent d’ennui distingué et dédaigneux… Mais il balaie d’un revers de main ces vanités et déclare vouloir se consacrer à son prochain et à Dieu. Quand ses frères le mènent pour la première fois au bordel, il reste interdit une fois le pas franchi, et pleure. Il lit Descartes, et se révolte contre son froid Cogito, préférant lui substituer un fier : « Je veux donc je suis. » Cette fronde le conduit à Rousseau, dont les Confessions lui semblent peindre les mouvements de son âme tourmentée. L’amour de la vie simple et rurale ou la haine de la société corruptrice d’une nature originellement bonne : les éléments de la pensée rousseauiste ne cesseront de l’influencer. L’adolescent aurait même possédé un portrait du philosophe genevois, qu’il portait à son cou, à la manière d’une petite icône sacrée. S’estimant au-dessus des contingences matérielles, il s’habille d’une robe de chambre en grosse toile qui lui sert également de couverture la nuit. Velléitaire, Tolstoï met fin à ses ambitions diplomatiques pour embrasser des études de droit auxquelles il est tout aussi peu assidu… Il décide alors de rentrer à Iasnaïa Poliana, dont il a hérité, afin d’y étudier. La résolution sera de courte durée : Tolstoï plie bagage pour Moscou, où il mène une vie mondaine et dissolue. Les plaisirs de la chair le tourmentent et les dettes de jeu s’accumulent. Pour les honorer, il n’hésite pas à vendre la demeure familiale de Iasnaïa Poliana, et les âmes qui y sont attachées. De Tolstoï à cet âge, Henri Troyat déclare : « Deux hommes – un voluptueux et un saint – cousus dans la même peau et se détestant. »

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Article issu du magazine n°44 octobre 2010 Lire en ligne
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