Pierre Vesperini : “Les États-Unis sont en proie au spectre de Weimar”
Complicités avec les forces de l’ordre et avec certains membres du Congrès, menaces à répétition contre les adversaires de Trump, actions en préparation pour le jour de la prestation de serment de Joe Biden… Pour l’historien Pierre Vesperini, ce qui se passe actuellement aux États-Unis renvoie non pas à une nouvelle guerre civile américaine mais à la République de Weimar dans l’Allemagne des années 1920, où les assassinats politiques se multipliaient devant des démocrates comme anesthésiées. Une analogie historique qui donne à penser.
Tandis que se dissipe le nuage de l’émeute, et avec lui la sidération et l’effroi, les informations affluent.
1. On sait aujourd’hui que, contrairement à ce qui était dit dans un premier temps, tout le monde savait, au Capitole, que la journée du 6 janvier serait chaude. De nombreux membres du Congrès ont confié à Michael Moore (voir sa vidéo à partir de 9’20”) qu’ils avaient la veille demandé à leur staff de ne pas se déplacer mercredi dernier. Un rapport du FBI avait également annoncé la veille ce qu’on pouvait déjà savoir pour peu qu’on suive les réseaux sociaux trumpistes : il y aurait la « guerre » (war) au Capitole.
2. Mais il y a plus : alors qu’on savait depuis des semaines que des dizaines de milliers de manifestants en colère allaient se jeter ce jour-là dans Washington pour empêcher le décompte des votes, le Capitole était anormalement dépourvu de protection. Plusieurs membres du Congrès ont raconté à Michael Moore leur stupeur en arrivant au Capitole mercredi matin : « C’était bizarre », dit l’un d’eux ; « On se serait cru un samedi », dit un autre (voir la vidéo à partir de 9’20”).
3. Nous savons maintenant qu’une part significative des émeutiers étaient des policiers et des militaires, les uns en service, les autres réservistes, d’autres encore retraités.
4. Enfin, nous savons désormais que les émeutiers ne furent pas seulement, comme l’ont immédiatement montré des vidéos, secondés par certains des policiers du Capitole, les uns prenant des selfies avec eux, les autres leur indiquant obligeamment le chemin du bureau de Chuck Schumer, chef du groupe démocrate au Sénat. Nous savons également, grâce en particulier au témoignage de la représentante Mikie Sherrill, que les jours précédant l’attaque, des membres du Congrès avaient eux-mêmes fait visiter les lieux aux futurs assaillants. Nous savons encore que c’est probablement la représentante du Colorado Lauren Boebert, proche de QAnon, qui a permis aux assaillants de trouver rapidement le bureau de Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des représentants. D’autres renseignements venant de l’intérieur du Congrès ont également permis ce qui aurait été tout simplement impossible : trouver le bureau secret du whip de la majorité démocrate, James Clyburn. En un mot : la complicité de certains membres du Congrès avec l’émeute était telle que plusieurs de leurs collègues ont en conséquence refusé de se rendre dans l’abri qu’on leur indiquait, de peur de se retrouver avec des collègues qui pourraient les désigner à la vindicte des assaillants. C’est le cas en particulier d’Alexandria Ocasio-Cortez, dont il faut regarder le témoignage « hitchcockien », décrivant la sensation, dès le début de la séance, que quelque chose « ne tournait pas rond » (something was wrong), l’impossibilité angoissante de savoir si tel ou tel policier allait la protéger ou la livrer aux assaillants, la certitude que certains de ses collègues le feraient avec joie (voir sa vidéo à partir de 8’45”).
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