Aller au contenu principal
Menu du compte de l'utilisateur
    S’abonner Boutique Newsletters Se connecter
Navigation principale
  • Le fil
  • Archives
  • En kiosque
  • Dossiers
  • Philosophes
  • Lexique
  • Citations
  • EXPRESSO
  • Agenda
  • Masterclass
  • Bac philo
 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
rechercher
Rechercher

Séminaire de Patrick Hochart et Pierre Pachet à l’EHEES / capture d’écran d'un enregistrement de MIHALACHI

Hors-série René Girard - automne 2011

Pierre Pachet : “Nous vivons dans des sociétés qui peuvent perdre leur équilibre à tout moment”

Pierre Pachet, propos recueillis par Martin Legros publié le 31 octobre 2011 6 min

[Entretien originalement paru dans le hors-série consacré à René Girard, en automne 2011] Et si l’enseignement le plus précieux de René Girard ne portait pas sur l’origine la plus archaïque du désir et de la violence, mais sur leur métamorphose dans les parages du XIXe siècle, au lendemain de la révolution démocratique ? C’est la pensée originale de l’écrivain et essayiste Pierre Pachet, qui propose de relire les thèses de René Girard sur le sacrifice à la lumière des écrits du très moderne Charles Baudelaire. Une confrontation qui donne à penser sur le déséquilibre constitutif de notre société des égaux.

 

« Lorsque parut Mensonge romantique et vérité romanesque, en 1961, ce livre a tout de suite rencontré un grand succès et a imposé René Girard comme nouveau critique littéraire. Il sortait la théorie de la littérature de ses carcans habituels (le style, les influences, les thèmes) et affirmait avec une clarté magistrale que les grands romans de notre culture, de Don Quichotte de Cervantès à Madame Bovary de Flaubert et à La Recherche de Proust, recélaient une vérité fondamentale sur la nature mimétique du désir. Les individus sont en général persuadés d’être uniques et singuliers, en particulier par l’objet de leur désir. Girard soutient que ce ne sont pas les qualités de l’objet désiré mais le rapport à celui qui l’a signalé à mon attention qui est décisif. Cette leçon a tout de suite fait l’effet d’une révélation, comme si un secret était dévoilé. Girard portait un regard nouveau sur les œuvres littéraires, un regard anthropologique qui se demande ce que la littérature révèle sur le phénomène humain. Il s’agit de replonger l’œuvre, qui se présente comme un ensemble clos, avec un principe d’organisation interne, dans le monde humain, dans l’ensemble de gestes, de rapports, d’émotions dont il n’est pas séparable. Ce que j’ai apprécié dans les livres de Girard, c’est que, négligeant l’équilibre des œuvres, leur style et leur composition, il y voyait cet effort d’élucider le phénomène humain. Voilà pourquoi il a marqué une rupture dans la critique littéraire. Mais c’est avec La Violence et le Sacré, paru dix ans plus tard, que la dimension véritablement philosophique de son travail est apparue. J’ai été secoué par cette lecture, c’est à cette époque que je l’ai fréquenté et me suis lié d’amitié avec lui. C’est un livre emporté, violent, qui a des aspects excessifs mais géniaux sur la question du sacrifice. Il mettait en place un scénario qui me touchait pour des raisons obscures, probablement parce qu’il mettait en lumière la présence de la victime, individuelle ou collective, dans toute une série de situations. Je ne pouvais pas ne pas penser à ce qui s’était passé au XXe siècle, où des peuples, comme le peuple juif, avaient été des victimes innocentes. Pour nombre d’entre nous, la réflexion de Girard avait une résonance émotionnelle immédiate. Le phénomène du bouc émissaire nous rappelait quelque chose que nous avions vécu. Et nous étions hantés après la guerre par ces questions : pourquoi est-ce qu’on s’en était pris aux Juifs ? Était-ce l’accomplissement d’une haine millénaire contre le monothéisme ou le résultat de l’instabilité des sociétés modernes ? Personne n’a répondu à ces questions. Mais l’œuvre de Girard, alors même qu’elle ne les abordait pas de front, leur redonnait une force. Girard est profondément catholique, mais son catholicisme, c’est évident, est un catholicisme d’après le désastre. Il tente de comprendre, avec la théorie de la rivalité mimétique, ce qui se passe dans la tête de chaque individu, un à un, quand une foule bascule dans la violence. J’ai trouvé chez Girard la conscience, qui m’a été très fraternelle, de ce qu’il y a de dangereux dans la foule indifférenciée, dans la masse qui peut de façon imprévisible, sous l’emprise d’une parole, d’un accident, d’un sang versé, virer à une populace sanguinaire qui ne veut plus se contrôler. Girard est très sensible au caractère infime de ce qui déclenche le choix de la victime. C’est de mon point de vue un des grands acquis de son anthropologie. Chez de très nombreux anthropologues subsistait l’idée que le sacrifice se porte sur des êtres marqués par une différence. Girard montre que ce marquage est rétrospectif. Et que les marques qui posent l’élection et l’exclusion de quelqu’un sont infimes. Cela tombe sur telle ou telle victime pour des raisons arbitraires : à un moment, l’indifférenciation est devenue si menaçante qu’il faut en sortir…

Expresso : les parcours interactifs
Comment apprivoiser un texte philosophique ?
Un texte philosophique ne s’analyse pas comme un document d’histoire-géo ou un texte littéraire. Découvrez une méthode imparable pour éviter le hors-sujet en commentaire ! 
Découvrir Tous les Expresso
Sur le même sujet
Article
1 min
René Girard, penseur du désir et de la violence
05 novembre 2015

Sommes nous libres de désirer ? Non, affirme le penseur René Girard, auquel nous avons consacré ce numéro exceptionnel. Nous désirons un objet…

René Girard, penseur du désir et de la violence

Entretien
11 min
René Girard : “ L’accroissement de la puissance de l’homme sur le réel m’effraie”
Juliette Cerf 24 septembre 2008

[Actualisation : René Girard est mort mercredi 4 novembre 2015, à l'âge de 91 ans] Auteur d'une théorie fertile et discutée, René Girard est…

René Girard : “ L’accroissement de la puissance de l’homme sur le réel m’effraie”

Article
4 min
Clausewitz par-delà Clausewitz : quand Girard relit “De la guerre”
Octave Larmagnac-Matheron 28 février 2022

Toute cette semaine, notre « livre du jour » est consacré à un ouvrage de référence sur la guerre. Nous commençons cette première…

Clausewitz par-delà Clausewitz : quand Girard relit “De la guerre”

Article
2 min
Quand René Girard donne du sens à l’exclusion politique d’Édouard Philippe
Cédric Enjalbert 27 octobre 2017

Quel sens revêt l’exclusion politique d’Édouard Philippe du groupe Les Républicains ? Celle d’une violence symbolique qui permet le rétablissement…

Quand René Girard donne du sens à l’exclusion politique d’Édouard Philippe

Article
3 min
Mort de René Girard, théoricien du “désir mimétique”
Cédric Enjalbert 05 novembre 2015

L’académicien René Girard est mort, ce mercredi 4 novembre 2015, à 91 ans. Penseur du désir et de la violence, il a bâti une “science des rapports…

Mort de René Girard, théoricien du “désir mimétique”

Article
5 min
Pierre Pachet. “Recouvrer la liberté en s’inclinant devant la nécessité”
Martin Duru 25 septembre 2014

La notion d’obligation prime celle de droit, affirme Simone Weil. Pour Pierre Pachet, l’enracinement que conceptualise la philosophe est certes une libération mais aussi une exigence.


Article
3 min
Pierre Pachet. « La vraie question,c’est celle du lien entre nihilisme et fascisme »
Martin Legros 24 mai 2011

Comment comprendre que certains intellectuels des années 1930 aient pu se laisser séduire par la promesse fasciste d’un homme nouveau ? En revenant sur l’itinéraire très singulier de Cioran, Pierre Pachet esquisse une réponse à l’une…


Article
3 min
L’écrivain et essayiste Pierre Pachet est mort
21 juin 2016

L’écrivain, essayiste, universitaire et penseur antitotalitaire, Pierre Pachet est mort ce mardi 21 juin 2016.

Pierre Pachet : “Nous vivons dans des sociétés qui peuvent perdre leur équilibre à tout moment”

À Lire aussi
“Bellone ou la pente de la guerre”, de Roger Caillois
Bellone, l’autre déesse de la guerre
Par Nicolas Gastineau
mars 2022
La société
Par Nicolas Tenaillon
août 2012
Comment faire échouer un “Anschluss”
Par Martin Legros
septembre 2010
  1. Accueil-Le Fil
  2. Entretiens
  3. Pierre Pachet : “Nous vivons dans des sociétés qui peuvent perdre leur équilibre à tout moment”
Philosophie magazine n°178 - mars 2024
Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
Avril 2024 Philosophe magazine 178
Lire en ligne
Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
Réseaux sociaux
  • Facebook
  • Instagram
  • Instagram bac philo
  • Linkedin
  • Twitter
Liens utiles
  • À propos
  • Contact
  • Éditions
  • Publicité
  • L’agenda
  • Crédits
  • CGU/CGV
  • Mentions légales
  • Confidentialité
  • Questions fréquentes, FAQ
À lire
Bernard Friot : “Devoir attendre 60 ans pour être libre, c’est dramatique”
Fonds marins : un monde océanique menacé par les logiques terrestres ?
“L’enfer, c’est les autres” : la citation de Sartre commentée
Magazine
  • Tous les articles
  • Articles du fil
  • Bac philo
  • Entretiens
  • Dialogues
  • Contributeurs
  • Livres
  • 10 livres pour...
  • Journalistes
  • Votre avis nous intéresse