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Nicolas Lebourg en 2015. © Hermance Triay/opale.photo

Présidentielle 2022

Nicolas Lebourg : “Marine Le Pen dispose de réservoirs de voix qu’elle pourrait mobiliser, avec une bonne campagne”

Nicolas Lebourg, propos recueillis par Ariane Nicolas publié le 14 avril 2022 5 min

Le second tour de l’élection présidentielle s’annonce serré. Selon les derniers sondages, Marine Le Pen récolterait, dimanche 24 avril, 46,5 % des voix contre 53,5 % pour son adversaire Emmanuel Macron. La campagne de l’entre-deux-tours sera donc décisive, notamment pour la candidate du Rassemblement national, qui avait raté son face-à-face télévisé avec Emmanuel Macron en 2017.

Mais dispose-t-elle de voix de réserve pour espérer l’emporter ? Son programme pourrait-il faire fuir des voix, par exemple chez les électeurs d’Éric Zemmour ?

Les explications de Nicolas Lebourg, chercheur à l’université de Montpellier, spécialiste de l’extrême droite et coauteur, entre autres, de Les Droits extrêmes en Europe (Seuil, 2015).

 

Quand on observe la carte électorale du premier tour, on constate un vote Marine Le Pen plutôt rural et, au contraire, un vote Zemmour urbain. Est-ce le signe d’une extrême droite divisée ou, au contraire, plus forte qu’auparavant, avec de nouveaux électeurs répartis plus équitablement sur le territoire ?

Nicolas Lebourg : Marine Le Pen n’a rien perdu dans ses bastions des classes populaires : vote des employés, des ouvriers, des agriculteurs, etc. À raison, on a beaucoup noté que le vote Zemmour était très typé, surperformant dans l’ouest parisien, par exemple (Éric Zemmour a fait 18,5 % à Versailles). Cela correspond aux données Médiamétrie qu’on avait pour ses émissions, ou au public de ses conférences et meetings, plutôt CSP+ et seniors. Il y aura là des gens qui se seront ainsi acclimatés au vote à l’extrême droite et qui pourront se reporter sur Marine Le Pen. Mais pas tous, car le programme économique de Marine Le Pen, sa conception colbertiste de l’État, ramèneront une partie vers la droite plus libérale. Sur le plan de la sociologie, il n’y a pas de bouleversement : Marine Le Pen demeure très forte chez les ouvriers, les non-diplômés, etc. C’est l’envers du vote Macron. La progression de sa pénétration électorale n’a pas entraîné de changement de fond de sa structure électorale – ce qui, en cinq ans, n’est somme toute pas déshonorant.

 

Le quotidien La Croix estime qu’environ 40 % des catholiques ont voté pour l’extrême droite. Traditionnellement, pourtant, on associe cet électorat au centre droit ou à la droite libérale, pro-européenne, aisée... Pourquoi un tel changement ?

La dynamique chez les catholiques a commencé dès le passage de Jean-Marie à Marine Le Pen. Chez les catholiques non pratiquants, le taux de vote lepéniste a évolué de 16 à 20 % entre 1988 et 2012, dépassant ainsi la moyenne nationale. Le fait que ce soit le segment non pratiquant implique d’ailleurs peut-être l’idée d’un moins grand encadrement social et culturel, et donc d’une plus grande appétence à une offre identitaire. Le profil que vous rappelez est effectivement plus zemmourien que lepéniste. 

 

Les commentateurs ne sont pas d’accord pour déterminer si le programme économique de Marine Le Pen est de droite ou de gauche. Qu’en pensez-vous ? Marine Le Pen peut-elle faire peur à une droite identitaire, mais libérale économiquement ?

L’argument sarkozyste selon lequel le programme économique de Marine Le Pen serait « de gauche » a été très performant, ruinant ses transferts de vote de droite lors des seconds tours de 2015, aux régionales et aux départementales. Comme l’argument moral à gauche, il n’est pas certain qu’il soit indéfiniment utilisable. Sur le plan concret, il repose sur une confusion entre le camp de la gauche et la modalité d’intervention économique de l’État. Dans les faits, il s’avère que le régime de Vichy était plus interventionniste que le gouvernement du Front populaire : nul n’ira penser que le premier était le plus à gauche. C’est donc une illusion mais une illusion qui a été efficace. Depuis 2017, le RN a essayé de s’ouvrir économiquement sur sa droite. Ainsi, les parlementaires européens RN ont publié un rapport affirmant qu’en fait la France a pâti de l’euro, de son excessive fiscalité et de la faiblesse qualitative de sa production, mais qu’elle a pu absorber le choc grâce aux « performances d’une belle brochette de grands groupes mondialisés et [à] la contribution immense du tourisme » (passage assez étonnant eu égard à la dénonciation du « mondialisme » par ce parti, mais qui montre bien la recherche d’un discours économique de droite).

“Marine Le Pen n’a pas mobilisé la totalité de son électorat potentiel au premier tour, et une ’abstention de droite’ pourrait lui être favorable”
Nicolas Lebourg

 

Chez les « petits » candidats à droite (Pécresse, Lassalle, Dupont-Aignan), sait-on comment pourrait s’effectuer le report de voix ? De quelles réserves de voix dispose Marine Le Pen, à l’entre-deux-tours ?

Les électeurs de Nicolas Dupont-Aignan avaient suivi leur candidat lors du second tour de 2017 et voté Marine Le Pen. Depuis, le président de Debout la France n’a cessé de s’inscrire un peu plus dans le champ de l’extrême droite : ceux qui ont opté pour lui la semaine passée ont toutes les raisons de prolonger ce vote. Les électeurs de Valérie Pécresse devraient en revanche très majoritairement se reporter sur Emmanuel Macron au nom de la survie de l’Union européenne. Le vote Jean Lassalle, en revanche, est plus compliqué – avec le respect qu’on lui doit ainsi qu’à ses électeurs, son score donne un peu l’impression d’un « vote blanc », d’un pur vote « antisystème ». Par ailleurs, Marine Le Pen n’a pas mobilisé la totalité de son électorat potentiel au premier tour, et une « abstention de droite » pourrait lui être favorable. L’abstention a été plus forte chez les femmes, chez les 25-34 ans, chez les ouvriers… Bref, dans des catégories où Marine Le Pen est performante. De même, on a une abstention forte dans le Nord-Est et le Sud-Est, terres souvent favorables au lepénisme. On peut tout à fait imaginer qu’avec une bonne campagne, Marine Le Pen trouve là des réservoirs de voix à mobiliser.

 

Deux questions pour conclure : jusqu’où Marine Le Pen peut-elle séduire la droite ? Et a-t-elle vraiment intérêt à le faire, finalement ?

Toute la difficulté de la Ve République, c’est de se baser sur une élection à deux tours. Donc, il faut ramener tout le monde, toutes les classes sociales, des opinions de toutes tendances. Le premier tour a montré, avec les votes Mélenchon et Le Pen, un formidable divorce entre le président sortant et les catégories populaires. La question n’est pas de rassembler des voix de gauche : elle est de convaincre les catégories populaires qu’elles seront moins maltraitées, plus respectées et mieux protégées avec elle en tant que présidente.

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