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L’héritage, une injustice… plébiscitée par les Français

Martin Legros publié le 2 min

« Pour que la propriété puisse être vraiment dite individuelle, il faut qu’elle soit l’œuvre de l’individu et de lui seul. Or, le patrimoine transmis par héritage n’a pas ce caractère : c’est seulement une œuvre collective appropriée par un individu », affirmait Émile Durkheim dans Le Socialisme (1928). Abolir ou du moins restreindre l’héritage pour accomplir le principe de l’égale liberté des individus : ce principe de justice, formulé par les saint-simoniens au lendemain de la Révolution, est à l’origine de la proposition de réforme de l’impôt de succession avancée par la fon­dation progressiste Terra Nova en janvier. La société française serait « une société d’héritiers », constatent les auteurs : le patrimoine augmente plus vite que les revenus – notamment du fait de la hausse du prix de l’immobilier –, le flux successoral annuel (la valeur monétaire des actifs transmis rapportée au revenu national), après avoir connu une longue décrue depuis le XIXe siècle, s’est envolé (52 milliards d’euros en 1980 contre 237 milliards en 2015), soit près de 10 % du PIB. De sorte que la part du patrimoine hérité dans l’ensemble des actifs des individus est passée de 33 % dans les années 1970 à 50 % en 2000. Dans le même temps, avec l’augmentation de l’espérance de vie, les individus héritent de plus en plus tard : ils avaient 42 ans à la mort de leurs parents en 1980, et 55 ans en 2035. Conséquence : « une répartition des richesses toujours plus con­centrée entre les mains de populations âgées peu disposées à investir et à consommer ». La fondation propose, pour y remédier, d’augmenter de 25 % l’impôt sur les successions – le taux moyen d’imposition sur les actifs transmis se situant aujourd’hui autour de 5 %. Une mesure qui permettrait de dégager de 3 à 4 milliards d’euros de recettes fiscales. 

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