Tommaso W. Bertolotti : “Les potentialités du Lego sont quasi infinies”

Une enquête récente indique qu’un tiers des Français adultes jouent au Lego. Cela vous étonne ?

Tommaso W. Bertolotti : Je ne suis absolument pas surpris : je suis moi même un passionné adulte, et je n’ai pas d’enfants ! L’une des raisons principales c’est, je crois, que Lego est un jeu extrêmement modulaire d’un point de vue cognitif, très simple dans son principe de base mais qui peut conduire à des créations extrêmement complexes : une fois que l’on est capable de réaliser l’opération fondamentale – joindre et détacher deux briques -, on peut tout faire. C’est exactement comme le langage : avec des bases de grammaires et de syntaxe, l’enfant et l’adulte peuvent parler et se comprendre – même si, bien entendu, ils n’ont pas le même nombre de mots à leur disposition. Et comme le langage, les potentialités du Lego sont quasi infinies, inépuisables : on peut réaliser des constructions toujours plus complexes, dont la sophistication croissante accompagne le développement cognitif de l’individu.

Cela explique aussi la dimension intergénérationnelle des Lego ?

Il faut ajouter un facteur purement matériel pour expliquer cette pérennité du Lego : la rétrocompatibilité. Les pièces d’aujourd’hui peuvent sans problème s’assembler avec des pièces d’il y a trente ans. Ce n’est pas le cas de tous les jeux, loin de là. Pensez par exemple aux jeux de PlayStation ! Les briques ne sont jamais périmées. Chacune est, en ce sens, un genre de madeleine de Proust qui réveille des souvenirs. Des sensations qui ne sont pas toutes agréables, au demeurant… Comme se casser les ongles en essayant de détacher deux briques, par exemple !