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Olivier Duhamel à Sciences Po Paris, en 2016. © Stéphane de Sakutin/AFP

Justice

Le paradoxe de la peine et de la prescription, d’après Hegel

Frédéric Manzini publié le 14 juin 2021 3 min

Affaire classée ! La décision du procureur de Paris est tombée : il considère que les faits reprochés au politologue Olivier Duhamel, accusé d’agressions sexuelles sur mineur, sont prescrits. Ce que l’on a appelé « l’affaire Duhamel » sera donc sans conséquences judiciaires. Si cette décision attendue était assez prévisible, elle n’en suscite pas moins certains émois, compte tenu de la gravité des faits reprochés qui semblent, en outre, avoir été reconnus par l’intéressé, qui paraît s’en sortir à bon compte d’un point de vue juridique. Mais en va-t-il de même du point de vue moral ?

 

  • Une question technique. Rappelons d’abord comment fonctionne la prescription. La législation française, semblable en cela à celles d’autres pays, considère qu’il existe un certain délai – variable selon la gravité des faits – au-delà duquel une action en justice n’est plus recevable. À l’exception des imprescriptibles crimes contre l’humanité, tous les autres crimes et délits ne peuvent donc entraîner des poursuites que pendant quelques années. Sur le plan juridique, la principale justification de la prescription est technique, et repose notamment sur la difficulté de produire des preuves longtemps après les faits.
  • Abolir la prescription ? Mais il existe d’autres raisons morales pour « justifier » la prescription. On peut espérer que le temps qui passe permettrait de régler tacitement les conflits et d’apaiser les souffrances. Rien n’est moins sûr pourtant, à en juger par le sentiment exprimé par les victimes d’agressions sexuelles qui, souvent, témoignent rester durablement traumatisées par les événements qu’elles ont vécus. En ne permettant pas au procès de se tenir, la prescription bloquerait a priori pour les victimes toute possibilité d’être reconnues comme telles et donc de « se reconstruire », tout en empêchant les innocents accusés à tort de se défendre... et laissant les coupables impunis. Ainsi comprise, la prescription apparaît comme un triple scandale, aussi bien juridique et moral qu’on aurait toutes les raisons de vouloir abolir.
  • Vengeance et punition. Mais est-ce bien le rôle de la justice que d’aider les victimes à se réparer ? Si tel était le cas, alors on risque de confondre vengeance et punition, prévient Hegel dans les Principes de la philosophie du droit (1820). Selon lui, la punition n’a pas pour but de donner satisfaction à la victime ou de commettre un tort au coupable, comme si la peine prononcée fournissait une sorte d’équivalent capable de « compenser » la faute commise : cette logique-là ne ferait qu’ajouter un second méfait au premier, sans réussir à le faire oublier. Pour Hegel, la punition a au contraire une finalité réparatrice pour le coupable lui-même, en lui permettant de se réinsérer dans la sphère du droit dont il s’est exclu par son crime, et donc de lui offrir une chance de se rétablir dans son statut de personne pleinement humaine et libre.
  • Le paradoxe de la prescription. Selon cette perspective hégélienne, rien n’est donc pire pour le coupable que de voir ses crimes prescrits puisqu’il se retrouve alors « condamné »... à ne se voir jamais reconnu coupable, et donc jamais non plus susceptible d’être réconcilié avec la morale, la liberté et l’honneur. Aussi paradoxale – voire ratiocinante – que cette conclusion paraisse, c’est pourtant bien à devoir supporter une culpabilité qui restera sans réponse que Olivier Duhamel est condamné, ce qui s’ajoute à la large condamnation médiatique et publique dont il fait déjà l’objet.
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