Le football est-il de droite ou de gauche ?

Le foot est à la fois un sport chéri des classes populaires… et pratiqué par des professionnels souvent multimillionnaires. Comment établir s’il est de droite ou de gauche? Moritz Rudolph passe les différents arguments en revue dans l’édition allemande de Philosophie magazine.

Il existe différentes manières d’envisager politiquement le football. La plus évidente est de catégoriser les joueurs selon leurs opinions, et ainsi de définir de grandes tendances. Suivant cette logique, l’attaquant star du Brésil Neymar, qui promettait de dédier ses buts à Bolsonaro s’il était réélu, est considéré comme étant de droite. L’ancien attaquant français Éric Cantona, en revanche, qui avait fait l’actualité il y a 25 ans en sautant pied en avant contre un spectateur ouvertement raciste et a appelé au boycott des banques, est toujours aujourd’hui une icône de la gauche.

Plus difficiles à trancher sont d’autres formes d’engagement politique. Mesut Özil [footballeur international allemand d’origine turque] est considéré comme le ramasseur de balles d’Erdoğan après quelques déclarations fayottes – mais cela en fait-il automatiquement quelqu’un de droite ? Dans la même veine, un footballeur comme Joshua Kimmich [autre international allemand] a pu être perçu comme un modèle d’engagement libéral… ou un penseur contestataire – selon l’évolution de son statut vaccinal [il avait d’abord refusé de se faire vacciner avant de changer d’avis]. Quoi qu’il en soit, cette entrée en matière ne permet pas de parler du football en général mais seulement d’une composante minoritaire ce sport.

Les trois grandes ères idéologiques du foot

Une deuxième approche politique du football, un peu plus porteuse, consiste à s’intéresser aux conditions de production du football. Nombreux sont ceux qui dénoncent la marchandisation du foot, qui a transformé l’ancien sport prolétarien en une pure entreprise aux mains des patrons capitalistes. Pire encore : les oligarques dominent désormais le football, qui n’est plus organisé comme un marché que les entreprises (les clubs) doivent surveiller en termes de revenus et de dépenses, mais qui sert de terrain de jeu à des magnats du pétrole, des cheikhs, des géants de la pharmacie, de l’automobile ou de l’informatique. Bref, d’horribles seigneurs contemporains qui ont vassalisé la planète entière.