La cage de fer de David Hume
David Hume, l’un des représentants de l’empirisme, pourrait être l’inventeur de l’adage : « Il n’y a pas de risque zéro. » Dans Traité de la nature humaine, le philosophe écossais décortique les mécanismes de nos croyances et montre que la vie suppose toujours un coefficient d’incertitude.
Toutes les garanties possibles vous ont été données, vous n’avez donc aucune raison d’être inquiet. La cage métallique semble solide, le câble en acier qui la maintient au-dessus du vide pourrait supporter cinquante fois votre poids, mais malgré tout vous êtes mal à l’aise et ne pouvez vous empêcher de regarder le sol qui semble bien loin. Vous ignorez ce que vous faites là. Persuadé de ne rien risquer, vous doutez, et si d’aventure quelque chose ne se passait pas comme prévu ou qu’on oubliait de vous remonter pendant quelques minutes, la panique ne tarderait pas à vous envahir.
Probabilité
Les relations de faits ne sont jamais que probables, car « il n’y a pas de fait dont la négation implique contradiction ». La probabilité varie en degré selon la force de nos habitudes.
Cette situation insolite – qui ressemble beaucoup à ce que nos contemporains vivent quand ils prennent l’ascenseur – a été décrite en 1739 par le philosophe écossais David Hume. Dans son Traité de la nature humaine, il invite le lecteur à s’imaginer suspendu dans une cage, pour lui montrer que nous sommes toujours, dans notre expérience, confrontés à un coefficient d’incertitude. Grand admirateur d’Isaac Newton, empiriste radical, David Hume considère que notre représentation du monde est structurée par la seule régularité de nos habitudes. Nous attendons de notre environnement qu’il témoigne d’une certaine stabilité, parce que nous reportons inconsciemment sur l’avenir les constats que nous avons observés par le passé. Si, dans une situation donnée, un phénomène a toujours eu les mêmes conséquences, nous avons acquis une habitude parfaite de cette relation de cause à effet et nous sommes certains de ne jamais voir notre anticipation démentie. « Chaque expérience nouvelle est comme un nouveau coup de pinceau qui donne une vivacité supplémentaire aux couleurs, sans multiplier ni agrandir la figure. » Il suffit d’une exception pour semer le doute. Loin d’être inébranlables, nos certitudes sont proportionnelles au nombre des cas observés. De ce que le soleil se lève chaque matin, et qu’il en a toujours été ainsi, nous pouvons conclure qu’il y a une forte probabilité pour que le soleil se lève demain matin, mais il faut aussi envisager l’éventualité qu’il ne se lève pas, car « il n’y a pas de probabilité si grande qu’elle n’admette une possibilité contraire ».
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