Banalité de Heidegger

Une recension de Mehdi Belhaj Kacem, publié le

Non content de porter haut le flambeau de la déconstruction à la française, Jean-Luc Nancy l’a enrichie d’un sens des nuances, d’une subtilité spéculative qui deviennent salutaires quand il s’agit d’ouvrir le dossier de l’antisémitisme de Heidegger, « révélé » par la parution en Allemagne des Cahiers noirs. Loin d’être un « détail », l’antisémitisme innerve des ramifications entières de la construction heideggérienne. Nancy rappelle d’abord l’évidence – d’où le titre emprunté à Arendt : l’antisémitisme a été pendant très longtemps un lieu commun d’opinion endémique de notre culture. Loin d’en appeler à l’indulgence sous ce prétexte, Nancy se livre à une analyse sans concession de l’hyper-antisémitisme heideggérien, sans pour autant nous installer dans la zone de confort du moralisme « démocratique » courant. Car, même dans ses aspects les plus sombres et ignobles, la lecture de Heidegger demeure nécessaire pour comprendre notre temps et notre histoire, estime Nancy. En quatre-vingts pages serrées, il livre une méditation qui tient quitte des tonnes de discussions aussi hystériques que oiseuses tenues sur le sujet depuis un an.

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