Viktor Pavlov. Il a choisi l’exil

Michel Eltchaninoff publié le 4 min

Viktor Pavlov est déterminé. La rage au ventre mais enfin libre, ce septuagénaire livre son dernier combat : dénoncer le régime de Poutine et les horreurs du stalinisme.

Viktor Pavlov a l’œil perçant et la silhouette massive ; un regard de philosophe et des mains de bûcheron. Il a d’ailleurs eu besoin de toute sa vigueur et de sa lucidité pour quitter son pays à l’orée de ses 70 ans. « Je me sentais menacé par la loi sur l’extrémisme, nom donné au délit d’opinion dans la “démocratie encadrée” de Vladimir Poutine. En 2006, j’ai quitté Saint-Pétersbourg pour la Finlande et la Norvège, avant d’atteindre la France », raconte-t-il, en russe, avec la simplicité qui le caractérise. Il vit depuis à Paris dans un centre d’hébergement pour immigrés, n’a pas un kopek en poche et ne perçoit aucune prestation sociale. Cela ne l’empêche pas de se sentir libre et à peu près heureux. Vêtements et nourriture lui sont fournis, il s’entend bien avec ses voisins de chambrée et passe ses journées en bibliothèque. Viktor a quitté sa famille, ses amis et son pays pour dénoncer un régime russe dont personne, selon lui, ne mesure la proximité avec le système communiste d’antan. Il promène sa détermination dans les rues de la capitale, frappe à toutes les portes, malgré son ignorance de la langue française, pour faire publier son livre sur la bataille de Stalingrad, dans lequel il dénonce le sacrifice par Staline de centaines de milliers de civils. Lorsqu’il évoque cette page de l’histoire soviétique, sa voix tremble, les larmes lui montent aux yeux.

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