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L’éléphant, symbole du parti républicain, et l’âne, symbole du parti démocrate (cc) Flickr / DonkeyHotey

Politique

Super Tuesday: de la démocratie en Amérique

Cédric Enjalbert publié le 01 mars 2016 5 min

Comme le veut la tradition électorale américaine, les délégués républicains et démocrates d’une large partie du pays élisent ce mardi 1er mars leurs candidats à l’élection présidentielle 2016. Les favoris désignés à l’issue de ce “Super Tuesday” seront très probablement les concurrents à l’élection générale.

Ce premier mars est un « super mardi » aux États-Unis. Douze États (sur cinquante) votent dans le cadre des primaires à l’élection présidentielle, prévue en novembre. Plus de mille cinq cents délégués démocrates et républicains participent à la désignation des concurrents à l’élection générale. Créé en 1988 pour peser dans la primaire en donnant une forte impulsion à l’un des candidats des deux partis, le Super Tuesday est une étape clé de l’élection, car les favoris sont quasiment assurés d’être les compétiteurs de l’élection générale, qui désignera le prochain président des États-Unis.


Républicains vs. Démocrates

En lice, du côté républicain, cinq candidats. Le milliardaire Donald Trump court largement en tête, malgré ses saillies populistes. Ou plutôt grâce à elles, car selon le journaliste Judd Legum, « dans le combat pour la présidentielle, Trump se comporte comme un catcheur professionnel, là où tous ses concurrents évoluent dans un match de boxe – ils se conforment aux règles établies, élaborent une stratégie. Lui se concentre sur le moment présent dans lequel il essaie d’injecter le maximum de passion. Et ses partisans adorent ça. “Les catcheurs savent très bien flatter le pouvoir d’indignation du public en lui proposant la limite même du concept de Justice, cette zone extrême de l’affrontement où il suffit de sortir encore un peu plus de la règle pour ouvrir les portes d’un monde effréné”, écrit Barthes. Jouant sur une agressivité débridée, Trump cible ses ennemis – la Chine, les clandestins, les dirigeants de fonds spéculatifs – et s’engage à les poursuivre. Et si, en défendant sa cause, il franchit une ou deux lignes rouges, c’est encore mieux. »

Côté démocrate, ils ne sont plus que deux. L’ex-secrétaire d’État Hillary Clinton est favorite, même si Bernie Sanders, le candidat autodéclaré social-démocrate, tire son épingle du jeu. Comme l’explique Michael Walzer, conscience critique la gauche américaine, « le parti républicain pourrait bien s’autodétruire, parce que ses candidats rivalisent pour savoir qui tirera le plus à droite afin de remporter les primaires. Je n’ai jamais vu un groupe politique aussi inapte à diriger un pays pluraliste, multi­ethnique et multireligieux. À l’opposé, Bernie Sanders est le premier candidat à se présenter sous l’étiquette socialiste démocrate. S’il a permis de montrer qu’il existe aux États-Unis bien plus d’intérêt pour une politique socialiste qu’on ne pouvait le penser, il ne sera sans doute pas investi candidat démocrate. Cela dit, j’espère qu’il parviendra à transformer ses partisans en une force politique efficace durant les élections et à motiver les autres à s’engager en politique. »


Achoppements

Y arrivera-t-il ? Pour Michael Walzer le très fort taux d’abstention aux États-Unis permet d'en douter. Ensuite, la question de l’immigration, qui est au cœur des débats, continue de faire peser une menace sur l’identité même du pays. Le philosophe rappelle combien l’Amérique, en effet, est un pays d’immigration, où tout Américain a un parent ou un grand-parent émigré. Il faut, selon lui, défendre fermement cette identité multiculturelle ; l’oublier serait trahir l’histoire du pays, et sa vocation. Enfin, il pointe un danger : « ces dernières années, aux États-Unis, les politiques en faveur de la défense des différences ont abouti à des avancées en matière de droit des femmes, des gays, des Noirs et des droits civiques, même s’il reste beaucoup à faire. De ce point de vue, les États-Unis sont devenus plus égalitaires. Cependant, si l’on regarde la population dans son ensemble, les inégalités et les hiérarchies sociales se sont creusées. La somme des progrès particuliers, louables et obtenus parfois de haute lutte par des groupes de défense des minorités, a paradoxalement et globalement renforcé l’inégalité : une fois leurs revendications satisfaites, ces groupes tendent à se retirer de la lutte contre la dérive inégalitaire de notre société. Bref, chacun défend ses particularismes et légitime l’ordre établi. Il est temps de revenir à la notion de classe, en réunissant non pas les électeurs autour de la défense de tel ou tel intérêt particulier, mais plus largement autour de la reconnaissance de la menace économique qui pèse sur tant d’Américains. Les politiciens doivent être suffisamment courageux pour s’atteler à la défense d’une vision libérale non individualiste : il s’agit de contrer les menaces de repli identitaire, en établissant des accommodements politiques qui rendent possible un pluralisme démocratique plus équitable. »

Dans un entretien de 2012, le philosophe Cornel West identifie une autre pierre d’achoppement contre laquelle la société américaine ne finit pas de buter : la persistance des discriminations raciales et des inégalités. Le succès des discours tenus par la droite radicale représentée par Donald Trump et l’ultraconservateur Ted Cruz, en tête des votes républicains, en est un symptôme inquiétant. « Je ne suis pas seulement effrayé de façon abstraite par le retour d’une droite folle, poursuit Cornel West : la situation est de pire en pire sur le terrain. Il existe pas moins de onze cents milices prônant la suprématie des Blancs dans l’Amérique d’aujourd’hui. Chaque jour, je reçois des menaces de mort. J’ai d’ailleurs la chance d’être toujours en vie. Comme Martin Luther King et beaucoup d’autres, vous aimez, vous souriez, vous prenez une balle, vous mourez, vous poursuivez la tradition. La haine, l’intolérance : nous voilà revenus à ce qu’il y a de plus sombre. »


 

De la démocratie en Amérique

Ces écueils politiques ne sont pas nouveaux. Dans De la démocratie en Amérique, Alexis de Tocqueville, qui admet avoir cherché au XIXe siècle vers le Nouveau Monde « une image de la démocratie elle-même, de ses penchants, de son caractère, de ses préjugés, de ses passions, j’ai voulu la connaître... pour savoir ce que nous devions espérer ou craindre d’elle », soulignait déjà le rapport conflictuel entre la liberté et l’égalité sur cette terre des possibles.

Dans ce pays où « la plupart des riches ont commencé par être pauvres », l’égalité émancipe et donne le goût d’être libre. Elle est un « fait générateur » de la société démocratique, son moteur. Mais elle est aussi une passion pour laquelle nous serions prêts à sacrifier notre liberté. Comme l’écrit Lucien Jaume, en spécialiste de Tocqueville, « le noble idéal d’égalité peut menacer la liberté, la pluralité et la diversité, s’il est capté par la jalousie et l’envie, elles-mêmes excitées par des démagogues ». Les populistes comme Donald Trump ne s’y sont pas trompés, qui tirent partie de ces passions pour espérer gouverner.

Quant à la question raciale, elle échappe nullement à Tocqueville: son périple dans le sud des États-Unis le déniaise. Aujourd’hui encore, les mouvements sociaux comme The Black Lives Matter [Les vies noires comptent] ou le succès du court essai écrit de Ta-Nehisi Coates, intitulé Une colère noire, démontrent la persistance de ces inégalités et la violence inapaisée des discriminations raciales, dont le pays de la liberté ne s’est toujours pas affranchi. Lauréat du National Book Award, le journaliste rappelle dans cette lettre à son fils les périls qui guettent les jeunes Noirs aux États-Unis. En très peu de pages, il déconstruit une bonne part du rêve dont se berce l’Amérique... au point de dessiller les yeux des électeurs qui sont appelés à choisir leur président ? Il est permis d’espérer.

Dossier Tocqueville et l’inégalité >>

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