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Patrick Sébastien, Patrick Bruel, Patrick Balkany. © Benaroch/Sipa © Aslan/Sipa © Baltel/Sipa

Toujours vert ?

Saint Patrick : plus si saint, Patoche ?

Frédéric Manzini publié le 17 mars 2023 4 min

En évangélisant l’Irlande au Ve siècle, saint Patrick a contribué à forger l’identité nationale de l’île. Mais tous les Patrick ne sont pas des saints, et plusieurs d’entre eux connaissent aujourd’hui des déboires avec la justice, de Poivre d’Arvor à Balkany. Et s’ils incarnaient une époque révolue, celle des « années Patrick » ?


Grandeur et décadence des Patrick

Si le prénom Patrick n’est plus guère donné aux nouveau-nés, il a connu un vif engouement dans l’après-guerre et est même devenu emblématique des années 1980-1990. Chronologiquement, les « années Patrick » ont en effet succédé aux « années Michel » (Fugain, Delpech, Platini, Colucci, etc.) : ce sont celles des Patrick omniprésents à la télévision, notamment sur TF1 (dirigée par… Patrick Le Lay), de Patrick Sébastien à Patrick Sabatier en passant par Patrick Roy et surtout Patrick Poivre d’Arvor, sur lequel Romain Verley vient de publier une enquête dérangeante . Dans le domaine de la chanson, Patrick Juvet et surtout Patriiiiick Bruel enchaînaient les succès, tandis que, à droite de l’échiquier politique, Patrick Devedjian et Patrick Balkany triomphaient lors des élections. La marque de vêtements « Patrick » habillait même les plus grands sportifs français.

 

De la génération dorée à la ringardisation

Tout a changé aujourd’hui. Du Patrick Chirac beauf dans le film Camping (avec sa réplique culte : « Alors, on n’attend pas Patrick ? ») à Patrick l’étoile de mer stupide dans Bob l’éponge, Patrick est devenu précisément le prénom qui symbolise une certaine forme de ringardise, et pas seulement pour une question de mode passagère. Notre propos n’est évidemment pas de stigmatiser un prénom en particulier. D’avance, donc, nous adressons nos plus plates excuses à tous les Patrick qui ne se reconnaissent pas dans ce portrait. Il est plutôt question ici d’interroger le changement qui s’est opéré dans la sensibilité collective en l’espace de quelques décennies. Et donc de penser un « Patrick-type », à la manière dont Max Weber recommande de construire un idéal-type en sociologie – soit un outil méthodologique, un modèle abstrait permettant de se représenter une réalité complexe sous une forme simplifiée mais lisible, pour permettre de penser une réalité évidemment plus complexe. Sauf qu’en l’occurrence, il s’agit davantage d’une déconstruction que d’une construction.

“Incarnation d’une certaine forme de virilité tranquille, sûre de son fait et dominatrice, ‘Patrick’ était charmeur, communicant et tout sourire”

 

Mais qui est Patrick ?

Qui, donc, est Patrick ? Ou, plus exactement, qui était-il ? C’était incontestablement un homme à succès animé par un fort sentiment de supériorité que confirme l’étymologie qui rattache ce prénom aux nobles « patriciens » de la Rome antique. Incarnation d’une certaine forme de virilité tranquille, sûre de son fait et dominatrice, « Patrick » était charmeur, communicant et tout sourire : grâce à son talent, il réussissait tout ce qu’il entreprenait et enchaînait les réussites professionnelles avec autant d’aisance que celle avec laquelle il multipliait les conquêtes amoureuses. Jean-Luc Godard avait déjà tout vu qui, en 1959 et sur un scénario d’Éric Rohmer, intitulait son premier court-métrage professionnel Tous les garçons s’appellent Patrick (que l’on peut visionner ici). Patrick (Jean-Claude Brialy) y est un coureur de jupons qui aborde et séduit facilement une certaine Charlotte (Anne Colette) au jardin du Luxembourg, puis enchaîne avec une dénommée Véronique (Nicole Berger), avant que toutes deux, qui sont colocataires, ne s’aperçoivent qu’il s’agit en réalité du même homme et qu’il sort déjà avec une autre…

 

“O tempora, o mores”… o Patrick !

À voir le court-métrage aujourd’hui, on pourra en apprécier le style délicieusement léger et ludique d’un vaudeville badin, entraîné par la vivacité du Rondo A Capriccio de Beethoven. Mais on s’étonnera surtout de la perception qu’ont les jeunes femmes de ce dragueur qui les fascine et qu’elles qualifient même de « sensationnel »… alors qu’il apparaît aujourd’hui insupportable d’arrogance, avec ses gestes déplacés de goujat, son baiser volé – une agression sexuelle ? –, sa lourde insistance et ses propos ouvertement misogynes sur les filles qui sont « toutes les mêmes », qui prennent toujours un lait-grenadine et qui « ne savent rien de rien ». On peine à comprendre comment elles ont pu être attirées par lui et l’on en vient même à se demander si les deux personnages féminins n’incarnent pas des clichés ou des fantasmes typiquement masculins (ceux de Godard ou de Rohmer ?) : des femmes qui semblent extérieurement libres et indépendantes, mais qui se révèlent vite disponibles et manipulables. De jeunes ingénues superficielles à l’eau de rose en quelque sorte. Du reste, le personnage de cette étudiante à la Sorbonne qu’est Charlotte aperçue au début du film en train de lire l’Esthétique de Hegel est surprise plus tard en train de dévorer un second ouvrage d’une toute autre teneur intitulé The Fate of the Immodest Blonde (autrement dit « le destin de la blonde impudique ») écrit par un certain… Patrick Quentin.

“Que le saint Patrick que nous fêtons aujourd’hui soit aussi le missionnaire d’une nouvelle masculinité, soucieuse et intranquille, qui cherche à se repenser, pour se réinventer”

 

Tous les hommes s’appellent-ils encore Patrick ?

Hegel, qui n’est pas un Patrick mais un Georg Wilhelm Friedrich, ne fait l’objet que d’une apparition fugitive dans le court-métrage, qui n’est suivie d’aucun effet. On pourrait être tenté de considérer qu’il y a d’un côté les Patrick et de l’autre… les philosophes. Mais ce serait manquer le sens de la formule Tous les garçons s’appellent Patrick – qui n’est que le sous-titre du film, puisque le véritable titre original est Charlotte et Véronique, comme si les personnages féminins avaient été éclipsés lors de la réception de l’œuvre. Le film nous invite plutôt à reconnaître certains traits de ces Patrick, qui n’ont pas disparu même s’ils portent désormais des prénoms plus modernes. Que le saint Patrick que nous fêtons aujourd’hui soit aussi le missionnaire d’une nouvelle masculinité, soucieuse et intranquille, qui cherche à se repenser, pour se réinventer.

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