Pierre Charbonnier : “La démocratie capitaliste verte n’est pas l’horizon ultime de l’histoire”
Pierre Charbonnier est un philosophe politique de l’écologie. Chercheur au CNRS, il a publié Abondance et liberté. Une histoire environnementale des idées politiques (La Découverte, 2020), un retour sur l’impensé écologique de l’idéal politique moderne. Il s’interroge dorénavant sur l’ordre politique global qui s’était constitué après la Seconde guerre mondiale, et qui a la particularité d’adosser l’idéal de paix à l’objectif de croissance.
« Depuis quelque mois, j’ai mis sur mon atelier conceptuel une question assez simple : comment faire la paix sans détruire la planète ? Ma démarche consiste toujours à faire une histoire écologique du politique. Dans Abondance et liberté, je m’y étais attelé en montrant comment la liberté politique des Modernes, conçue par Hobbes, Locke et Rousseau et mise en place au travers des grandes révolutions politiques et économiques, s’était édifiée sur la base d’un présupposé implicite, celui d’une quête indéfinie d’abondance. L’éloignement des contraintes matérielles est ce qui a permis de donner corps à l’idéal démocratique, en promettant à tous de bénéficier à terme de cette promesse d’abondance collective. Si on l’admet, cela débouche sur une question fondamentale : est-il possible de défaire ce lien entre abondance et liberté, dont on aura compris qu’il est à l’origine de la crise écologique ?
Aujourd’hui, je travaille sur une période historique plus resserrée, celle qui court de la fin de la seconde guerre mondiale à aujourd’hui et est tendue par la quête d’un ordre international pacifié, après la catastrophe militaire et fasciste. Cette paix, qui a paradoxalement pris la forme de la “guerre froide”, passe par plusieurs dispositifs que sont l’équilibre nucléaire, la démocratisation relative du capitalisme par l’État social dans les pays riches, le projet de développement des pays du Sud et l’universalisme des droits de l’Homme. Or, ces dispositifs de pacification coïncident avec ce que les historiens appellent la grande accélération, c’est-à-dire l’explosion des quantités d’énergie et de matière intégrées aux flux économiques. Pour faire la paix (qui est l’autre valeur cardinale des démocraties modernes avec la liberté), il fallait donc en passer par un réaménagement total des milieux humains dont on sent aujourd’hui qu’il contient les germes d’autres guerres, d’autres conflits.
“Il y a un consensus, à gauche, sur l’idée que la crise écologique doit servir de vecteur pour radicaliser la critique du capitalisme. Et, à bien des égards, je partage cette vision”
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