Passe sanitaire : Macron a-t-il inventé la quasi-obligation ?

Emmanuel Macron serait-il en même temps libéral et autoritaire ? C’est la question que tout le monde se pose depuis son allocution du mois de juillet dernier, lors de laquelle, sans rendre la vaccination obligatoire, il a annoncé de multiples restrictions d’accès aux lieux de loisirs et de culture (restaurants, bars, cinémas, musées), ainsi qu’aux transports comme le train ou l’avion. Dans tous ces cas, à défaut de vaccination, un test négatif est devenu nécessaire et bientôt payant. Pourquoi alors préférer la forte contrainte à l’obligation pure et simple ?

Pour le comprendre, sans doute n’est-il pas inutile de revenir aux fondamentaux de la philosophie politique moderne. Dans Les Rêveries du promeneur solitaire (1782), Jean-Jacques Rousseau écrit: « Je n’ai jamais cru que la liberté de l’homme consistât à faire ce qu’il veut, mais bien à ne jamais faire ce qu’il ne veut pas. » Il faut entendre la phrase dans son double sens. Il s’agit bien entendu, négativement, de rejeter ce qui nous contraindrait à faire ce que nous ne voulons pas faire – et c’est pourquoi, en démocratie, les obligations seront mal vécues. Mais il s’agit aussi, positivement, par contraste avec les sociétés anciennes, de solliciter le consentement actif des citoyens à l’ensemble des règles qui leur sont données pour vivre ensemble. En d’autres termes, la démocratie moderne nous demande d’acquiescer aux décisions du pouvoir, y compris aux limites légales imposées aux libertés individuelles.