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Des membres de la communauté juive se rassemblent place de la République à Paris, le 5 janvier 2020, pour réclamer le procès du meurtrier de Sarah Halimi, déclaré pénalement irresponsable. Une irresponsabilité confirmée mercredi dernier par la Cour de cassation. © Christophe Petit Tesson/EPA/Maxppp

Justice

Meurtre de Sarah Halimi : comprendre l’arrêt de la Cour de cassation

Ariane Nicolas publié le 19 avril 2021 4 min

Le meurtrier de Sarah Halimi ne sera pas jugé. Mercredi 14 avril, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi des parties civiles, qui demandaient de reconnaître la responsabilité pénale de Kobili Traoré, l’homme qui avait frappé et défenestré sa voisine de 65 ans le 4 avril 2017, à Paris. Un collège d’experts a de nouveau conclu à « l’abolition » du jugement du meurtrier, reconnu comme « psychotique » et pris d’une « bouffée délirante », ce qui coupe court à tout procès.

Cet arrêt de la Cour de cassation a soulevé l’émoi dans une partie de l’opinion publique, notamment au sein de la communauté juive, le caractère antisémite du meurtre ayant, lui, été reconnu. Plusieurs personnes ont fait le parallèle avec une autre affaire, celle d’un homme condamné à de la prison ferme après avoir jeté un chien par la fenêtre, à Marseille, et qui était sous l’emprise d’alcool et de cocaïne pendant les faits. En quoi ces deux affaires sont-elles différentes au regard de la justice ? Explications.

 

  • L’article 122-1 du Code pénal impose de ne pas juger les personnes dont le discernement serait « aboli » au moment des faits. Pour déterminer si un « trouble psychique » a effectivement conduit à une telle « abolition », le juge peut s’appuyer sur des expertises psychiatriques et la jurisprudence. Lorsque l’abolition est reconnue, il n’y a pas de procès. Il en va différemment si l’accusé a connu non pas une abolition mais une « altération » du discernement, un qualificatif qui maintient la responsabilité de la personne. La distinction entre les deux termes est fine, mais importante : un procès doit ici avoir lieu (avec une éventuelle réduction de peine à la clé). Là encore, c’est aux experts et à la jurisprudence d’éclairer la décision du juge.
  • Dans l’affaire Sarah Halimi, les parties civiles contestent l’abolition du discernement du meurtrier. Pourquoi ? Selon les avocats, l’irresponsabilité pénale ne vaudrait que dans le cas des « maladies mentales » et pas de la « toxicomanie », où la personne commet un « acte volontaire » de consommation de stupéfiants (d’après cette lecture, toute personne qui prend de la drogue sait à quel type de comportements elle s’expose, et doit donc toujours être jugée responsable). Par ailleurs, le fait que l’accusé ait proféré des paroles antisémites (« J’ai tué le démon », notamment) soulignerait que son discernement n’était pas complètement aboli, puisqu’il avait encore conscience de la judéité de Sarah Halimi au moment des faits.
  • Comment comprendre l’arrêt de la Cour de cassation ? Pour la juridiction la plus élevée de France, l’abolition du discernement du meurtrier ne fait pas de doute. À l’unanimité, sept experts ont conclu à une « bouffée délirante aiguë » dont l’auteur, consommateur régulier de (fortes doses de) cannabis, ne pouvait se douter qu’elle se produirait : c’est la première fois qu’il perdait le contrôle de ses actes. « Les troubles psychiques [de l’accusé] avaient commencé le 2 avril 2017 », indique la Cour, qui rappelle que Kobili Traoré avait augmenté sa consommation de drogue pour « calmer son angoisse et ses insomnies », « ce qui n’a fait qu’aggraver le processus psychotique déjà amorcé ». Un épisode qualifié de « psychose chronique, probablement schizophrénique », qui s’est d’ailleurs poursuivi plusieurs jours après les faits (l’homme a été hospitalisé). « La loi ne prévoit pas de distinction selon l’origine du trouble psychique », maintient donc la Cour. Ainsi, elle ne fait pas de distinction entre deux éventuels types de responsabilité pénale : l’une qui s’appliquerait uniquement au moment précis de l’acte délictueux (et serait levée en cas d’abolition du discernement) ; et l’autre, indirecte, qui s’appliquerait rétroactivement à cet acte (ce qui justifierait donc de juger son auteur dans tous les cas). Autrement dit, elle respecte un principe d’égalité entre les personnes victimes de troubles psychiques, sans juger des raisons pour lesquelles les personnes ont vu leur discernement aboli.
  • Un changement de loi envisagé par Emmanuel Macron. Face aux protestations d’associations de lutte contre l’antisémitisme et à l’émoi de nombreux internautes, le président de la République a annoncé qu’il souhaitait une modification de la loi sur la responsabilité pénale en cas de consommation de drogue. Il en juge ainsi dans une interview au Figaro, lundi 19 avril : « En République, on ne juge pas les citoyens qui sont malades et n’ont plus de discernement, on les traite, assure-t-il. Mais décider de prendre des stupéfiants et devenir alors ‘comme fou’ ne devrait pas à mes yeux supprimer votre responsabilité pénale. »
  • Cette vision de la responsabilité pénale a toutefois de quoi questionner. Elle suppose d’une part qu’un trouble psychique suscité par la prise de stupéfiants soit toujours prévisible, ce qui n’est pas le cas (les effets secondaires du cannabis ne mènent que très rarement au délire). Et d’autre part, que ce trouble doive se manifester sur un temps suffisamment long pour pouvoir être considéré comme une « maladie », alors que certaines manifestations sont compulsives et brèves. À cet égard, la Cour de cassation souligne bien que l’épisode délirant du meurtrier de Sarah Halimi a été « bref », mais bien « psychotique », donc d’ordre psychiatrique (ce qui n’était pas le cas de l’homme ayant défenestré un chien à Marseille). Faudra-t-il considérer à l’avenir que les « fous » sous l’emprise de drogue auront moins de droits que les « fous » sobres ? C’est la question de fond posée par l’annonce présidentielle, qui risquerait toutefois de contrevenir au principe juridique fondamental selon lequel « on ne juge pas les fous ».
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