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L’asexualité possède son propre drapeau. © iStockphoto

Air du temps

L’asexualité, quèsaco ?

Nicolas Gastineau publié le 09 juillet 2022 3 min

Avez-vous déjà entendu parler de l’« asexualité » ? Comme l’indique le préfixe privatif a-, l’asexualité désigne une orientation sexuelle qui se manifesterait par son absence : l’asexuel est celui qui ne désire pas engager des relations sexuelles avec autrui. L’enquête la plus citée, datée de 2004, conduite par le psychologue spécialiste du sujet Anthony Bogaert en Grande-Bretagne, estime la part d’individus asexuels dans la population à 1% – un chiffre possiblement sous-estimé. Depuis les années 2000, il semble en tout cas que l’asexualité ait changé de dimension : le passage d’un état de fait, que certains vivraient sans savoir le nommer, à, désormais, l’affirmation d’une orientation…

L’occasion de revenir aux origines du concept, avec l’activiste féministe new-yorkaise Lisa Orlando, et de réfléchir à la conception du désir qu’il sous-tend, avec Épicure.

 

  • Le manifeste asexuel. En 1972, dans l’effervescence des libérations sexuelles new-yorkaises, la féministe Lisa Orlando, passée par le lesbianisme militant, tente de tirer les conclusions sexuelles de son féminisme radical. Elle publie un texte, Le Manifeste asexuel (The Asexual Manifesto, traduit ici par Élie Grau), qui passe inaperçu hors des milieux militants, mais a fait l’objet d’une redécouverte récente. Son idée est que tant que la sexualité reste à ce point grevée par le sexisme, par la propension à exploiter l’autre ou à le réduire au statut d’objet, il faudrait s’en tenir à distance. « Nous en sommes venues à considérer cette utilisation d’autrui comme une exploitation et nous avons compris qu’en permettant aux autres de nous utiliser de la même façon, nous donnons notre accord à notre propre exploitation. » On comprend donc que l’asexualité au sens de Lisa Orlando n’est pas une orientation que l’on découvre ou qui s’impose à nous, mais bien plutôt une position intellectuelle dans l’existence, déduite de principes politiques. Ce qui explique sa façon de présenter l’asexualité, sous le mode du manifeste ou de la déclaration : « Après examen de nos expériences selon nos valeurs, nous sommes parvenues à une asexualité qui est à la fois une revendication et une manière d’être. Le sexe interpersonnel ne nous est plus important, plus suffisamment pour justifier le rôle destructeur et perverti qu’il a joué dans nos relations. »
  • Désir et besoin. Le sexe interpersonnel, affirme Lisa Orlando, « n’est pas un mode de comportement instinctif ; c’est un comportement que nous avons appris à utiliser pour la satisfaction d’un besoin (pour l’orgasme) que nous pouvons facilement satisfaire par nous-mêmes… » L’autrice ne définit donc pas tant l’asexualité comme une absence du « besoin » de satisfaction sexuelle, mais plutôt comme son expression solitaire. Il faut noter que Lisa Orlando parle avec raison ici de besoin sexuel, comme le besoin de boire ou de se nourrir, et non de désir. Et pour cause : le désir implique un manque, l’absence d’une chose ou d’un être qui se trouve hors de soi. Le désir, donc, ne peut être solipsiste, il se dirige toujours vers un extérieur : comment pourrait-on se désirer soi-même, c’est-à-dire se manquer à soi ?
  • La maîtrise épicurienne du désir. On peut conclure que chez Lisa Orlando, la désactivation du désir sexuel (en tant que désir du corps de l’autre) est la condition de possibilité de l’asexualité. Cela ne signifie pas l’extinction de tout désir d’autrui, puisqu’il existe des « asexuels romantiques » déclarés qui s’engagent dans des couples sans vie sexuelle – mais il s’agit néanmoins de raisonner son désir. Dans la Lettre à Ménécée, le philosophe grec Épicure affirme que le désir, puisqu’il est un manque, peut conduire à la perpétuelle insatisfaction et à l’intranquillité. Le risque étant alors de poursuivre de mauvais désirs, ceux qui ne sont pas naturels ou nécessaires, comme celui d’un vin de grand prix ou d’une vie de luxure, au risque de se placer dans le futur manque de tels objets. Il faut donc pratiquer une véritable ascèse, un examen minutieux de ses désirs pour ne garder que les plus simples, ceux dont la satisfaction est aisément garantie et nécessaire à la vie. Il y a quelque chose d’épicurien dans la démarche de Lisa Orlando : ce désir lui semblait néfaste, alors elle l’a rejeté. Car, écrivait Épicure, ce n’est pas la jouissance « qui engendre la vie heureuse, mais c’est le raisonnement vigilant, capable de trouver en toute circonstance les motifs de ce qu’il faut choisir et de ce qu’il faut éviter ».
À lire aussi : Le sexe et les tourments de la libido, vus par Pascal Bruckner
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