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Faut-il oublier le passé pour se donner un avenir ?

Nicolas Tenaillon publié le 5 min

Analyse des termes du sujet

« Faut-il »

Est-ce une nécessité, une exigence morale ou psychologique ?

« oublier le passé » 

Ne pas conserver dans la mémoire son vécu propre ou celui des autres, voire de l’Histoire.

« pour »

Implique un but, un effet.

« se donner un avenir » 

Être l’auteur de ce qui nous arrivera, des choix possibles que nous offre le futur.

 

Défrichage

Premières intuitions

On constate aisément que le passé a tendance à nous modeler : l’éducation reçue, les habitudes contractées motivent souvent nos choix à notre insu. Il est donc très tentant de s’affranchir de tout passé pour construire soi-même son destin.

Pourtant, négliger totalement ce qui a eu lieu pour se tourner vers le futur semble non seulement psychologiquement difficile mais moralement risqué. Les enseignements du passé pourraient nous manquer, car l’amnésie volontaire incite à commettre les mêmes erreurs, à répéter les tragédies de l’Histoire.

Il y aurait donc des choix à faire parmi nos souvenirs. Garder ceux qui nous sont utiles pour l’avenir et repousser ceux qui nous empêchent d’être libres et créatifs. Il s’agit de trouver un juste équilibre entre devoir de mémoire et droit à l’oubli.

Exemples qui viennent à l’esprit

Le concept de devoir de mémoire apparaît en France dans les années 1970, notamment sous l’influence du texte de Vladimir Jankélévitch, L’Imprescriptible (1971). Contre les populismes, il s’agit de rappeler l’horreur des crimes commis par les nazis afin de ne pas créer les conditions de leur répétition. Le devoir de mémoire sert la construction d’un avenir démocratique durable.

Dans la nouvelle Funès ou la Mémoire (1942), l’écrivain argentin Jorge Luis Borges décrit le cas d’un homme qui n’oublie rien. Son hypermnésie l’empêche d’agir et le plonge dans une incurable mélancolie.

La maladie d’Alzheimer, dont le film Still Alice de Richard Glatzer et Wash Westmoreland (2014) montre les effets tragiques sur l’identité, prouve que nous ne saurions vivre sans mémoire. Oublier le passé, c’est ignorer ce que l’on fait au fur et à mesure que l’on agit ; c’est ne plus savoir qui l’on est. Il devient alors impossible de se donner un avenir sans lui.

Expresso : les parcours interactifs
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