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Cillian Murphy dans “Oppenheimer” (Christopher Nolan, 2023). © Universal Pictures, tous droits réservés

Cinéma

Benoît Pelopidas : pourquoi “Oppenheimer” rate sa cible

Benoît Pelopidas, propos recueillis par Elliot Mawas publié le 26 juillet 2023 12 min

Oppenheimer est sorti en salles. En retraçant la vie du « père de la bombe nucléaire », le film nous aide-t-il à saisir le péril qui est devant nous ? Non, répond le spécialiste du nucléaire Benoît Pelopidas. Le film, au contraire, minimise le danger. Entretien.


 

Vous avez vu Oppenheimer. Qu’en avez-vous pensé ?

Benoît Pelopidas : Le réalisateur Christopher Nolan est un très bon directeur d’acteurs. L’acteur Cillian Murphy [à qui revient le rôle-titre, celui du physicien Robert Oppenheimer] est excellent, Robert Downey Jr. arrive à jouer un rôle de composition, ce qui n’était pas donné d’avance. La photographie est de qualité, au service d’une reconstitution de l’époque dont nous reparlerons. Le problème apparaît dès que l’on se demande quels sont les effets de ce dispositif esthétique soigné et démonstratif.

“Oppenheimer est assez confortable, formellement soigné et pas effrayant le moins du monde” Benoît Pelopidas

 

Pourquoi ?

Dans un entretien accordé au Bulletin of the Atomic Scientists à l’occasion de la sortie du film, Nolan insiste sur la nécessité que ses spectateurs prennent la mesure de l’immense capacité de destruction des armes nucléaires. C’est ce qui m’a intéressé, dans le cadre de mes travaux sur le rôle de la culture populaire dans la prise de conscience de la possibilité d’une catastrophe nucléaire de grande ampleur. Mais je pense que le film échoue de ce point de vue : il affiche une volonté de nous faire peur, de créer un malaise à même de nous faire réfléchir, mais reste en fait assez confortable, formellement soigné et pas effrayant le moins du monde. Les effets qu’il produit ne sont pas à la hauteur des intentions annoncées et le film passe beaucoup de temps à afficher des intentions plutôt qu’à les mettre en œuvre.

 

Vous semblez donner à la fiction un rôle presque politique dans notre conception du problème nucléaire ?

La politique nucléaire globale contemporaine se structure comme l’affrontement de deux conceptions de la sécurité nationale et internationale. Une coalition considère les armes nucléaires comme une garantie de sécurité, une autre les considère comme un problème de sécurité. Il faut bien sûr ajouter des divergences éthiques et les obligations des États en termes de désarmement. Mais le problème (comme je l’ai développé ailleurs) est que nous ne croyons pas que la catastrophe puisse advenir ou n’agissons pas comme si nous comprenions cette réalité. Nous faisons comme si ce n’était pas possible. Günther Anders (1902-1992) appelait ce phénomène « le décalage prométhéen » : nous avons du mal à nous représenter la puissance de destruction de la bombe nucléaire autrement que comme une abstraction parce qu’elle dépasse tout ce que l’on connaît et que nous nous en remettons à des experts para-officiels dont la position et le rôle consistent à convaincre de la crédibilité de la dissuasion nucléaire nationale, ce qui les rend par définition incapables d’en dire les limites ou de donner un panorama complet des vulnérabilités nucléaires (je présente des preuves détaillées ici). Cette inadéquation entre ce que nous savons et ce que nous voulons croire nous rend vulnérables parce que le savoir disponible ne guide pas notre action. La fiction nous aide à croire à ce que nous savons sur nos vulnérabilités nucléaires sur la possibilité de la catastrophe et l’absence de protection. Elle nous place en tant que spectateur dans un monde dans lequel nous pouvons suspendre notre incrédulité face à ces réalités. C’est en ce sens que l’on peut parler de la fiction comme médiateur politique puissant, voire nécessaire : elle nous permet d’agir à la mesure de notre vulnérabilité plutôt que de la nier.

Un film historiquement douteux et qui esthétise le danger sans effrayer
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