Réactiver le sens commun. Lecture de Whitehead en temps de débâcle
Une recension de Catherine Portevin, publié leIl fallait oser s’emparer de cette notion si difficile à saisir : le sens commun. Ce n’est pas exactement le bon sens, tout aussi indéfinissable, ou les lieux communs de la pensée courante. La philosophe des sciences Isabelle Stengers cherche à le réhabiliter. Selon elle, il émergerait plutôt à l’étape suivante : lorsque les questions, les bouts de réponses divergentes, les expériences concrètes, les convictions, tout ce qui nous fait « ruminer » sur l’existence, peut « faire sens en commun ». Or cette rumination a été disqualifiée par la science qui se glorifie de « choquer le sens commun », et par une tradition philosophique construite contre l’ignorance. Les effets de l’opposition frontale dans laquelle « ceux qui savent » sont chargés de convaincre un troupeau d’imbéciles sont, socialement, intellectuellement, écologiquement, politiquement délétères. C’est pour ces « temps de débâcle » qu’Isabelle Stengers relit, une fois de plus (ce livre est la reprise d’un ouvrage de 2017), le logicien et philosophe britannique Alfred North Whitehead (1861-1947), son idée de la philosophie comme devant « souder le sens commun et l’imagination » et sa cosmologie conçue comme un réseau de processus interdépendants. La réflexion d’Isabelle Stengers vise elle aussi à tout tenir ensemble… mais perdra en route les lecteurs non initiés ! Pour un plaidoyer pour le sens commun, c’est dommage
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L’éclairage de Stéphane Haber