Quand sort la recluse

Une recension de Catherine Portevin, publié le

Il paraît que la recluse mord lorsqu’elle se sent prisonnière. Il paraît que du côté de Nîmes, on a recensé des cas de piqûres graves. Personne n’en est mort… sauf dans le roman de Fred Vargas où plusieurs octogénaires ont été emportés en deux jours par des doses massives de venin de l’araignée Loxosceles rufescens, cousine de la reclusa d’Amérique. Attendez-vous à vous laisser piéger comme dans une toile d’araignée. Car tous les codes du polar sont renversés. L’on compare communément l’enquête criminelle à l’empirisme (la connaissance progressant par l’indice interprété de façon inductive). Mais Adamsberg, le célèbre commissaire de Fred Vargas, est-il un empiriste ? Certes, il partage avec Épicure le primat accordé à la sensation, et même aux « prénotions » – Adamsberg laisse venir ses « proto-pensées » comme des « bulles gazeuses ». Mais reprenons les définitions de Francis Bacon (1551-1626), le théoricien de l’empirisme moderne. Il dépeint l’empirique en fourmi, amassant tout ce qu’elle peut au dehors d’elle-même, contre le rationaliste qui est comme… l’araignée tissant sa toile à partir de sa propre substance. Adamsberg, qui puise la vérité dans les brumes et souvent dans les siennes, serait-il au fond un rationaliste ? Disons alors, un rationaliste du genre brumeux.

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