L'homme qui aimait trop travailler

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À chaque tâche effectuée, Sommer rature une ligne de sa to do list. C’est un de ses grands plaisirs. Il répond par e-mail plutôt que par téléphone : c’est plus précis ; rien ne lui déplaît tant que de sentir dans une voix la pointe d’un affect. À midi, il fuit ses collègues pour se vider la tête sur un tapis de course : « Exit la conscience, le prétendu vernis d’humanité. » La passion de Sommer, c’est l’efficacité, la fluidité des processus, son travail de responsable logistique dans l’agroalimentaire. Son ex lui écrit qu’elle n’a « jamais vu de cœur si fermé que le [s]ien » ? Il supprime l’e-mail et replonge dans son tableur Excel. Sommer, c’est le Meursault de Camus en open space, de plus en plus étranger à lui-même et aux autres. La fable est belle, sombre et réussie. On la referme en se demandant si c’est la passion du travail qui a rendu Sommer incapable d’amour, ou s’il ne s’est pas jeté dans l’obsession du résultat précisément parce qu’il était incapable d’aimer.

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