Le Fil perdu. Essais sur la fiction moderne

Une recension de Philippe Garnier, publié le

Au fil de six conférences, Jacques Rancière explore ce laboratoire du politique qu’est la littérature, en analysant le roman moderne tel que l’instaurent Gustave Flaubert, Joseph Conrad ou Virginia Woolf. La fiction n’a désormais ni sujet ni matière propres : elle peut parler de tout et de rien. L’intrigue est une structure plus ou moins arbitraire qui sert à ouvrir au vertige de l’expérience sensible, à la vie impersonnelle du grand Tout. Aucune action, aucun objet ne méritent d’être décrits plutôt que d’autres. La caméra de l’écrivain se promène sur une « pluie d’atomes » impersonnelle, un flux du réel sans plus aucune hiérarchie. Ce virage esthétique révèle l’imbrication profonde du récit de fiction et de la construction sociale. C’est la thèse forte de Rancière : tout récit repose sur une hiérarchie et toute hiérarchie repose sur un récit. Ainsi, la démocratie du roman périme l’action stratégique du héros et réhabilite le sensible ordinaire.

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