Je consens, donc je suis... : Ethique de l'autonomie
Une recension de Juliette Cerf, publié leConsentir, c’est tantôt dire oui, tantôt ne pas dire non. Quelle est la portée contemporaine de cette ambivalence ?
Le consentement, qui renvoie à l’autonomie des individus, a pris une place immense dans le champ de l’éthique. Dans les débats juridiques, il a tendance à apparaître comme l’unique critère de la légalité. Ce qui est problématique. Un exemple : en principe, on ne peut consentir à son propre meurtre. Or, si c’est le consentement qui sépare le licite de l’illicite, le meurtre lui-même pourrait devenir légitime… Mon titre est ironique envers cette équation simpliste, passe-partout : « Je consens donc je suis. »
Consentir, c’est engager son corps ?
Oui, le consentement engage l’individu tout entier et pas seulement sa rationalité. Je critique la position de ceux qui, au nom du consentement, oublient la fragilité humaine. Notre corps est soumis à toute une série de contraintes psychologiques, sociales, économiques. Dans le cas du don d’organes, quand un parent donne un organe à son enfant, il y consent. Mais le contexte – culpabilisation par rapport à la maladie de l’enfant, sens du devoir parental – doit être pris en compte. Il arrive que ce don, contraint, entraîne un chantage affectif de la part du donneur sur le receveur qui, de son côté, peut ressentir une lourde dette envers lui.
Quels faits sociaux révèlent le mieux cette notion ?
L’éthique médicale qui a évolué d’un modèle paternaliste, où le médecin décide, vers un modèle autonomiste, qui fait du patient un acteur à part entière. Cette montée en puissance du consentement a été confirmée par une loi en 2002 : « Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne, et ce consentement peut être retiré à tout moment. » La relation médecin-malade n’est pas symétrique : la dissymétrie est épistémique – le médecin sait des choses que le patient ignore – autant qu’existentielle – le patient est fragilisé par la maladie. Il est donc faux de croire que le consentement lie toujours des agents rationnels et autonomes.
Outre la santé, la sexualité fournit la majorité de vos exemples…
Le consentement y est essentiel. Il rend possible la pénalisation du viol en tant qu’acte sexuel non consenti. Mais, encore une fois, le consentement ne suffit pas à rendre un acte légitime. La majorité des prostituées, libres en apparence, ont subi des violences et ont donc été traitées comme des choses. Comme si cette réification était pour elles la seule façon d’exister. De même, le sadomasochisme révèle que le consentement peut être biaisé. C’est la tâche de la philosophie de prendre en charge la complexité de ces situations réelles, vécues.
Corriger un nez camus ou s’offrir une paire de seins rebondis : alors qu’en France, le recours au bistouri se banalise – avec quelque 20 000 opérations par an –, Michela Marzano en éclaire les enjeux moraux.
Face à la guerre menée par la Russie sur le sol européen, il est plus que jamais indispensable de parvenir à comprendre à ce qui nous arrive, sur le plan…
La révolution féministe #MeToo a mis en lumière la notion clé de consentement. Mais des voix s’élèvent aussi pour en montrer les limites, d’un point de vue…
Le consentement est-il suffisant pour qu’une relation sexuelle soit équilibrée ? N’est-il pas une entrave au désir et au plaisir ? Comment, dès…
Petit quiz : pour quelle raison seuls 12 % des Allemands sont donneurs d’organes après leur décès, alors que 99,98 % des Autrichiens le sont ? Il s’agit après tout de deux pays culturellement proches et au pouvoir économique similaire. La…
Tout est permis entre adultes consentants ? Ce principe simple suppose que la volonté soit une et entière Or, celle-ci peut être déviée ou influencée par le charme, les beaux discours, l’alcool, la timidité… Mais alors faut-il pour…
Pourquoi les nouvelles restrictions sanitaires récemment entrées en vigueur dans la région de Marseille ont du mal à passer ? Michel…
Et vous, allez-vous vous faire vacciner contre le Covid-19 ? Si la vaccination n’est pas rendue obligatoire, chacun sera bientôt amené à se poser la…