Archéologies du futur
Une recension de Philippe Garnier, publié leÀ quoi servent les utopies ? Marx les accusait d’égarer l’énergie révolutionnaire. Pour les réformistes, elles détournent du cours inéluctable du progrès. Selon le critique littéraire et spécialiste du marxisme Fredric Jameson, leur rôle est d’une autre nature. Dans cette réédition des Archéologies du futur, son grand livre paru en 2005 – ici publié en compagnie de Penser avec la science-fiction dans une traduction révisée –, les utopies sont mises en résonance les unes avec les autres, depuis Thomas More au XVIe siècle jusqu’aux auteurs de science-fiction du XXe siècle. Chacune porte en elle une préoccupation essentielle, un centre de gravité : pour Charles Fourier, c’est le désir, pour Saint-Simon l’administration, pour Edward Bellamy la méritocratie, pour William Morris la fin du travail aliéné… Chaque utopie tente de répondre à une souffrance majeure, béante, spécifique à son époque. Contrairement à la foi dans le progrès, elle ne vise pas à une amélioration progressive mais à une solution radicale.
Que reste-t-il des utopies dans les années 2000 demande Fredric Jameson ? Sont-elles encore pensables et désirables ? D’après lui, l’idée de totalité sociale a disparu et avec elle le projet utopiste. Est-ce une perte irrémédiable ? Non, répond-il, car ce qui compte, ce n’est pas tant que l’utopie soit réalisable mais qu’elle soit capable d’irradier la réalité. Elle agit comme une force d’attraction, un horizon plutôt qu’un levier. Dès lors, sa dimension imaginaire devient décisive. Là réside le sens de l’autre partie du volume, Penser avec la science-fiction. Désormais, la force de l’utopie n’est plus dans un système global mais, au contraire, dans une pluralité d’enclaves où s’abolissent les frustrations et où le rationnel et l’onirique se mêlent. Ces archipels prospèrent du côté de la science-fiction technologique mais aussi au sein de la « fantasy » et de ses chimères. Comme le pensait déjà Ernst Bloch, l’utopie s’incarne dans les détails du quotidien, dans des émotions à peine formulées, des rêveries tenaces. Elle est avant tout du domaine de l’attente. Philippe Garnier
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