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Le livre du jour

“Vivre avec des épouvantails”, de Michel Agier (Premier Parallèle)

Victorine de Oliveira publié le 02 novembre 2020 3 min

Nous le pensions derrière nous, mais la courbe du nombre de cas de Covid et le président de la République en ont décidé autrement. C’est une réflexion menée à partir de l’expérience du premier confinement que l’anthropologue Michel Agier propose dans son nouvel essai Vivre avec des épouvantails. Le monde, les corps, la peur (Premier Parallèle, 160 p., 16 €). Née de « l’urgence de comprendre, de retenir le chaos par la pensée », elle s’ancre d’abord dans la sidération, et même dans la peur de l’auteur. Cette peur, c’est celle qui s’est emparée des corps, soudain anxieux de se frôler, de se contaminer d’un simple souffle. À cela s’ajoute aujourd’hui l’horreur de retrouver une situation potentiellement traumatisante. 

Michel Agier s’est souvenu de ses voyages en Amérique du Sud, où les fêtes, notamment les carnavals, mettent en scène des figures de la peur, soit toutes sortes d’épouvantails destinés à personnaliser mais aussi ridiculiser l’objet de l’épouvante. Autant de créations imaginaires qui permettent une forme d’exutoire collectif. 

Alors que certains s’apprêtaient peut-être à fêter Halloween et sa joyeuse nuit passée à se donner quelques frissons sans risque, le reconfinement et son cortège d’angoisses nous donne l’occasion d’inventer peut-être de nouvelles formes d’exutoires. 

Une menace invisible

« Tu n’as rien vu du Covid-19, et pourtant il s’est bien passé quelque chose », remarque Michel Agier. Pour la plupart d’entre nous, du moins ceux qui n’ont pas eu à se rendre dans un service de réanimation pour soutenir un proche malade par exemple, nous n’avons pas vu grand-chose de cette pandémie. Si, bien sûr, nous avons été abreuvés d’images via les médias et les réseaux sociaux, nous n’avons pas été en première ligne. 

Ce qui ne nous empêche pas d’avoir eu peur. Par l’anxiété qu’il a généré, et générera sans doute à nouveau, le confinement a ajouté une peur diffuse à la peur directement liée à la possibilité d’une contamination. Le confinement, soit une mesure plus directement sécuritaire que sanitaire, a transformé une peur existentielle (celle de la mort par exemple) en peur sociale. Le risque ? La mise en place d’une « politique de la peur », qui n’aurait qu’un rapport indirect avec le virus et servirait avant tout au contrôle des corps.

De nouveaux rituels bien visibles

L’apparition progressive des masques sur les visages des passants, jusqu’à ce que la loi les rende obligatoires dans les lieux clos puis les espaces publics, a rendu la menace plus visible et palpable. Insolite en France, le masque est un objet culturel bien connu des anthropologues, « en général associé à une situation d’exception, hors du quotidien ordinaire » comme les fêtes, carnavals, commémorations et célébrations. « Le port du masque […] reste associé à une situation d’exception. Il la manifeste en quelque sorte. S’il rassure parce qu’il protège, il inquiète parce qu’il signifie qu’on n’en est pas encore sorti, qu’on est donc ordinairement dans l’exception et que le danger est toujours présent. » 

Moins anxiogènes, les applaudissements de 20 heures ont aussi été une manière de rendre l’événement palpable, tout en retrouvant ses voisins à heure fixe à la fenêtre. Un autre genre de rituel qui forme peut-être, selon l’anthropologue, « les prémices d’un savoir social nouveau sur ce que peut être la vie quotidienne en temps d’incertitude, quand la peur est toujours là sans que nous acceptions d’être empêchés de vivre. »

Inventer nos propres épouvantails

« L’épouvantail est le nom d’une forme esthétique donnée au cataclysme effrayant et il est en même temps l’expression de la peur. Ce qui fait peur est la peur elle-même » : il ne s’agit pas de supprimer la peur, comme pourrait nous y inviter une parodie de coach en développement personnel, mais de la transformer, de la déplacer dans un objet aussi effrayant que ridicule. 

Il existe de multiples exemples d’« imaginaires de peur » : les visiones, soit des esprits qui peuplent la forêt colombienne, sont représentés lors des carnavals, notamment dans les villes où la violence liée au trafic de drogue est la plus élevée et la plus meurtrière. 

Un mécanisme similaire est à l’œuvre lorsque Rabelais met en scène un Pantagruel qui inonde d’urine tout une ville. Le grotesque de la situation recouvre une peur ancestrale, celle de la fin du monde notamment après le déluge. La représentation ridicule désamorce tout en lui accordant une place centrale, la peur médiévale du cataclysme. S’il semble que nous allons devoir « vivre avec des épouvantails » sur le long terme, autant donc inventer nos propres exutoires. 

(Re)lisez notre dossier consacré à la peur
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