Aller au contenu principal
Menu du compte de l'utilisateur
    S’abonner Boutique Newsletters Se connecter
Navigation principale
  • Le fil
  • Archives
  • En kiosque
  • Dossiers
  • Philosophes
  • Lexique
  • Citations
  • EXPRESSO
  • Agenda
  • Masterclass
  • Bac philo
 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
rechercher
Rechercher

© 2020 Disney/Pixar. All Rights Reserved.

Écrans

“Soul” : le triomphe du dualisme cartésien

Ariane Nicolas publié le 10 janvier 2021 4 min

Les humains possèdent-ils une âme ? Si oui, cette âme préexiste-t-elle au corps ? Sommes-nous un corps, une âme ou les deux à la fois ? Ces questions ne sont pas les prochains sujets du baccalauréat que Philosophie magazine vous révèlerait en exclusivité, mais les grands problèmes qui animent Soul, dernière production des studios Pixar (disponible sur la plateforme Disney+ depuis le 25 décembre). Ce film d’animation métaphysique raconte le périple de Joe Gardner, un jazzman au parcours laborieux qui se trouve plongé, après un fatal accident, dans une zone intermédiaire entre la vie et la mort : un univers parallèle, nommé le « Grand Avant », sorte de monde d’avant l’existence où les esprits en formation sont dotés de leurs traits de caractère.

Le titre du film annonce la couleur : l’âme (« soul », en anglais) existe bel et bien. Elle se matérialise à l’écran sous la forme de petits êtres mignons, flasques et blancs, qui ressemblent globalement à une colonie de fantômes à la Casper. Pete Docter, coréalisateur avec Kemp Powers de Soul et déjà aux manettes de Vice-Versa, semble ainsi réhabiliter le dualisme cartésien en faisant de l’âme une substance à part entière, tout aussi réelle que le corps. Mais contrairement à l’auteur des Méditations métaphysiques, Soul développe en plus, à partir de cette distinction entre l’âme et le corps, un discours plus existentiel, qui questionne la destinée de chacun. 

La bande-annonce de Soul (en version française).

 

Dans Soul, tout marche par deux

Il y a les âmes et les corps, qui sont réunies sur notre planète et découplées dans l’au-delà ; la Terre et le « Grand avant », sorte d’usine à âmes d’où ces dernières entament leur voyage vers la planète bleue ; ainsi que le duo entre Joe Gardner et l’âme « numéro 22 » (qui deviendra son ami), symbole de deux approches de la vie : le premier l’aime, la seconde pas. Le film lui-même opère un va-et-vient entre des séquences assez réalistes et des passages beaucoup plus abstraits et oniriques, où les personnages dessinés n’ont d’humain que la voix. L’histoire elle-même se retourne à un moment [attention, divulgâchis], le personnage principal se rendant compte que le destin auquel il se croyait promis ne lui correspondait en fait pas vraiment. 

L’âme, une « substance pensante »

Dans ce Pixar, on retrouve le thème cher à Descartes d’une distinction entre l’âme et le corps. L’auteur des Méditations métaphysiques les conçoit en effet toutes les deux comme des substances incommensurables. D’un côté, le corps représente une portion d’étendue divisible et réglée mécaniquement. De l’autre, l’esprit est conçu comme une « chose pensante », c’est-à-dire libre, une et indivisible. Pour Descartes, comme pour le personnage « 22 » et ses consœurs dans Soul, l’âme est donc capable de vouloir, de désirer, d’imaginer, de sentir. Dans le film, « 22 » n’est pas une substance sans identité ni sensibilité, elle a déjà sa personnalité : le personnage est taquin, obstiné et faussement cynique. 

 © 2020 Disney/Pixar. All Rights Reserved.
© 2020 Disney/Pixar. All Rights Reserved.

Comment l’âme et le corps sont-ils unis ?

Si ces deux substances sont incommensurables, comment peuvent-elles coexister en l’homme ? Descartes n’a cessé de sonder cette énigme. Il déploiera ainsi l’idée d’une « union » de l’âme et du corps au niveau de la « glande pinéale ». Et d’après lui, c’est Dieu qui décide librement de cette union en l’homme de l’âme et du corps. Le film Soul n’est pas beaucoup plus précis, puisqu’on se contente de voir des âmes se jeter dans le vide du haut d’une galaxie puis habiter le corps de Terriens. Ce léger flou empêche d’ailleurs de bien comprendre comment les âmes se construisent. Lorsque l’âme de « 22 » intègre le corps de Joe Gardner, elle se reconnecte aux souvenirs de ce dernier, tout en conservant les siens propres. Les souvenirs sont donc tantôt logés dans un corps, tantôt non. 

Dans Soul, le dualisme ouvre à une question existentielle sur le destin

On pourrait croire, parce que les âmes préexistent dans un « Grand Avant », que tout est déjà joué d’avance et que les identités sont déjà toutes assignés dès la naissance. Pourtant, le film se montre plus ouvert sur cette question, le personnage de Joe Gardner se rendant compte qu’il n’est pas fait pour ce à qui il se pensait destiné (pianiste de jazz). Pete Docter le dit lui-même en ces termes, maniant diverses références philosophiques : « On commence avec de l’essentialisme – l’idée selon laquelle “Je suis né pour faire ça”, quelque chose qui évoquerait Aristote ou Platon. Et puis, grâce notamment à l’humour de 22, on se rend compte que rien n’a vraiment de sens. Et donc on bascule à la fin vers de l’existentialisme, un peu dans la veine de Kierkegaard : “Hey, la vie est pleinement spirituelle. Tout ce qu’on fait contribue à nous construire en tant que personne et à donner un sens à notre vie.” » Pixar réussit ainsi, avec une inventivité visuelle encore une fois très réussie, à unir la très classique notion de dualisme à une préoccupation plus contemporaine : celle de savoir si, pour paraphraser Sartre, « nous pouvons faire quelque chose de ce que le “Grand Avant” a fait de nous ». Âme stram gram : la réponse est oui !

 

Soul, film d’animation de Pete Docter et Kemp Powers et dernier-né des studios Pixar, est visible sur la plateforme Disney+.

Pour en savoir plus sur le dualisme cartésien
Expresso : les parcours interactifs
Aimer sa moitié avec le Banquet
On dit parfois que la personne aimée est « notre moitié », celui ou celle qui nous complète. L'expression pourrait trouver son origine dans le mythe des androgynes, raconté dans le Banquet de Platon ! Découvrez ce récit fascinant.
Découvrir Tous les Expresso
Sur le même sujet
Article
3 min
Les deux corps des présidents américains
Jean-Marie Pottier 06 octobre 2020

Dans Les Deux Corps du roi. Essai sur la théologie politique au Moyen Âge (1957), Ernst Kantorowicz donne une définition de cette « …

Les deux corps des présidents américains

Article
11 min
Étienne Klein : “Comme Nietzsche, je me méfie de toute idée qui n’est pas née dans un contexte musculaire”
Arthur Hannoun 05 novembre 2021

Dans son dernier livre, L’Esprit du corps (Robert Laffont, 2021), le scientifique et philosophe Étienne Klein s’intéresse à un domaine de…

Étienne Klein : “Comme Nietzsche, je me méfie de toute idée qui n’est pas née dans un contexte musculaire”

Article
7 min
Denis Kambouchner : “Les complotistes sont tout sauf cartésiens”
Ariane Nicolas 20 novembre 2020

Douter radicalement de la réalité du monde pour établir de nouvelles certitudes : la méthode déployée par Descartes dans ses Méditations…

Denis Kambouchner : “Les complotistes sont tout sauf cartésiens”

Article
9 min
Archie Shepp, jazz à l’âme
Cédric Enjalbert 27 juillet 2012

Le festival Jazz à la Villette débute ce mercredi 3 septembre 2014. L'occasion de relire cet entretien avec Archie Shepp, emblème mythique du Free…

Archie Shepp, jazz à l’âme

Article
2 min
Âme qui vive
Cédric Enjalbert 03 décembre 2020

Soul, la dernière production des Studios Pixar, vous embarque dans un voyage métaphysique joyeux et sensible. Quand le cinéma d'animation s'offre…

Âme qui vive

Article
9 min
Raphaël Imbert. “Ce qui a sauvé John Coltrane peut nous aider à traverser l’expérience du confinement”
Martin Legros 02 mai 2020

Le confinement nous donne l’occasion de faire une expérience de la sacralité de l’instant, qui est au cœur de l’histoire du jazz, affirme le…

Raphaël Imbert. “Ce qui a sauvé John Coltrane peut nous aider à traverser l’expérience du confinement”

Article
2 min
Raphaël Imbert. Souffler, c’est jouer
Martin Legros 18 février 2016

À 15 ans, il s’est retrouvé par hasard avec un saxophone entre les mains. Depuis, un passage au conservatoire de Marseille, une enquête musicale et philosophique sur les traces de cette "spiritualité" propre aux jazzmen ("Jazz supreme…


Article
7 min
Le jazz, expression de l’impensable ?
Elise Nebout 19 septembre 2012

À l’occasion de l’exposition « Le Siècle du jazz » proposée au musée du Quai-Branly, Daniel Soutif, son commissaire, et Christian Béthune, auteur notamment de Le Jazz et l’Occident, commentent quelques-unes des œuvres présentées. Pour…


À Lire aussi
Une étreinte à l’européenne
Par Michel Eltchaninoff
septembre 2012
John Searle. « La distinction entre corps et esprit est un faux problème »
John Searle. « La distinction entre corps et esprit est un faux problème »
Par Harry Kreisler
octobre 2008
Élisabeth de Bohême, la grande âme
Par Catherine Newmark
  1. Accueil-Le Fil
  2. Articles
  3. “Soul” : le triomphe du dualisme cartésien
Philosophie magazine n°178 - mars 2024
Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
Avril 2024 Philosophe magazine 178
Lire en ligne
Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
Réseaux sociaux
  • Facebook
  • Instagram
  • Instagram bac philo
  • Linkedin
  • Twitter
Liens utiles
  • À propos
  • Contact
  • Éditions
  • Publicité
  • L’agenda
  • Crédits
  • CGU/CGV
  • Mentions légales
  • Confidentialité
  • Questions fréquentes, FAQ
À lire
Bernard Friot : “Devoir attendre 60 ans pour être libre, c’est dramatique”
Fonds marins : un monde océanique menacé par les logiques terrestres ?
“L’enfer, c’est les autres” : la citation de Sartre commentée
Magazine
  • Tous les articles
  • Articles du fil
  • Bac philo
  • Entretiens
  • Dialogues
  • Contributeurs
  • Livres
  • 10 livres pour...
  • Journalistes
  • Votre avis nous intéresse