Rencontre avec Sandrine Bonnaire

Juliette Cerf publié le 5 min

La comédienne réalise un premier film sur sa sœur autiste, dont l’état s’est dégradé après cinq ans d’internement. Ce documentaire met face à face les deux visages de Sabine, avant et après l’hôpital psychiatrique.

Elle s’appelle Sabine, documentaire de Sandrine Bonnaire

 

Le jardinage l’ennuie. Sabine prend son temps, fait des -pauses, suspend le cours du temps. Elle s’allonge dans l’herbe, se love dans son lit : « T’es pas une pute, t’es ma sœur. T’es pas une connasse, t’es ma sœur. » Psychose infantile avec comportements autistiques : le diagnostic tombe tel un couperet. Brouillant les frontières entre l’imprécation et la bénédiction, arrachant jusqu’à la folie les pétales du oui et du non, Sabine est une pure interrogation : « Tu viens me voir demain ? » ; « C’est sûr et certain que tu viens me voir demain matin ? » ; « Tu vas venir demain ? » ; « Demain, tu seras avec moi quand j’irai au Quick ? », demande-t-elle, lancinante, à sa sœur Sandrine Bonnaire. Comme pour apaiser cette angoisse du lendemain, Sandrine offre à sa sœur un présent, une identité : Elle s’appelle Sabine. Révélée en 1983 par Maurice Pialat dans À nos amours, la comédienne, habituellement regardée, regarde ici. L’éducateur Fernand Deligny, initiateur d’un réseau d’enfants psychotiques dans les Cévennes – dont on vient d’éditer les œuvres complètes (voir page ci-contre) – se demandait ce que pouvait signifier le verbe -« invivre » pour ces êtres jugés invivables. En inversant le dispositif du regard, en passant derrière la caméra, Sandrine invente un refuge pour sa petite sœur. Et lui offre l’occasion de se sentir vivante.

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