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“La Nostalgie du futur” © Sébastien Huste

Théâtre

Quand meurent les lucioles

Cédric Enjalbert publié le 12 octobre 2018 3 min
Que dit Pasolini de notre époque ? Le philosophe Guillaume Le Blanc et la metteuse en scène Catherine Marnas s’associent pour mettre les textes du cinéaste à l’épreuve du temps présent dans “La Nostalgie du futur”, qui pèche par manque de dialogues.

« Au début des années 1960, à cause de la pollution atmosphérique et, surtout, à la campagne, à cause de la pollution de l’eau (fleuves d’azur et canaux limpides), les lucioles ont commencé à disparaître. Cela a été un phénomène foudroyant et fulgurant. Après quelques années, il n’y avait plus de lucioles », écrit Pier Paolo Pasolini dans les Écrits corsaires. Dans cet essai, le cinéaste italien s’inquiète de la disparition des lucioles, qu’il prend pour une image de l’époque. Selon lui, la luminosité intense des villes, des téléviseurs, le « bruit » de notre environnement écraserait les lumières les plus faibles, celle ténue des lucioles, et la possibilité même de la nuit. Les pleins feux de la société industrielle, consumériste, balaierait toutes les valeurs « archaïques », sinon humanistes. « Les valeurs nationalisées et donc falsifiées du vieil univers agricole et paléo-capitaliste d’un seul coup ne comptent plus. Les remplacent les valeurs d’un nouveau type de civilisation, complètement “autre” par rapport à la société paysanne et paléo-industrielle. »

La metteuse en scène Catherine Marnas s’empare de cette métaphore qu’elle transpose au théâtre, avec la collaboration du philosophe Guillaume Le Blanc, auteur d’une réflexion sur la « décence ordinaire » et les « vies minuscules », après Orwell et Foucault. Ensemble, ils ont imaginé La Nostalgie du futur, conçu comme un dialogue avec Pasolini. Maintenant que la crise d’accueil des refugiés pose aux peuples européens la question de leur capacité d’hospitalité, de leurs ressources intellectuelles, de leur confiance dans l’avenir, alors que les tentations populistes fracturent le continent, que signifient encore ces écrits « corsaires » ? 


“La Nostalgie du futur” © Sébastien Huste

Crises des subjectivités 

« Aujourd’hui, note Guillaume Le Blanc, ce que nous appelons de l’expression autorisée “la crise des migrants” est en réalité une crise des subjectivités contemporaines qui basculent massivement dans un état spectral car elles se retrouvent sans protections, sans droits et deviennent de leur vivant comme effacées. » L’effondrement des lueurs et des valeurs, de la croyance dans le progrès, du sentiment de classes, des statuts et des protections, l’effacement de toute projection dans l’avenir menaceraient l’individu comme personne, la constitution de l’homme comme sujet politique et éthique. Sur scène, deux exilés qui se voudraient sortis d’En attendant Godot jouent les marcheurs pasoliniens et leur inclinaisons à refaire le monde en route. Mais Beckett n’est qu’un écho. Le texte manque de souffle dramatique et, de façon générale, le spectacle laisse large place aux effets visuels, trop peu aux dialogues.

Il reste cette tentative de confrontation avec Pasolini, dont une scène interpétée par le comédien Yacine Sif El Islam. Elle demeure la plus remarquable, bien que trop courte. Tous les artifices de mise en scène disparaissent. Les vidéos projetées s’éteignent. Un jeune homme répond alors à la nostalgie de Pasolini – « je suis en train d’oublier comment étaient les choses auparavant ». Il s’emporte contre le discours qui laisserait penser que les jeux sont faits. Ces objections suscitent enfin un échange de théâtre, sur scène. Elles donnent du sens au titre du spectacle, posé par Guillaume Le Blanc comme un oxymore : la nostalgie du futur. Elle s’oppose évidemment à la nostalgie du passé, mais pas comme une nostalgie à venir. Elle attire l’attention sur la vertu de l’anticipation, au présent et pour l’action, envisageant de ce que nous pourrions perdre plutôt que s’attarder sur la lamentation de ce qui a été perdu. 

Informations

La Nostalgie du futur
Mise en scène de Catherine Marnas 
Avec Julien Duval, Franck Manzoni, Olivier Pauls, Yacine Sif El Islam, Bénédicte Simon
Théâtre national de Bordeaux-Aquitaine 
Du 9 au 25 octobre 2018
Durée : 1h35

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