Pierre Boureau, 26 ans, en L3 de philosophie : “L’urgence qui me saisit est une urgence du devoir”
Isolement, ennui, manque d’accompagnement, détresse psychologique, difficultés économiques… Les étudiants ont été frappés de plein fouet par la crise sanitaire. Nous avons décidé de leur donner la parole pour faire entendre leurs souffrances, mais aussi leurs espérances et leurs conseils philosophiques pour affronter la pandémie.
Aujourd’hui, Pierre Boureau, 26 ans, étudiant en troisième année de licence de philosophie à l’université de Nantes. S’il a affronté le premier confinement avec une sérénité toute stoïcienne, conscient que les choix politiques étaient nécessaires et que les événements ne dépendaient pas de lui, il est aujourd’hui rattrapé par l’inquiétude. Seule solution, à ses yeux : non pas rêver du « monde de demain », mais assumer « l’urgence du devoir », ici et maintenant.
Le témoignage de Pierre Boureau :
« Le premier confinement m’est apparu comme “la” chose à faire, et, partant de là, je n’avais qu’à m’en accommoder. J’ai donc pris les choses avec patience, absence d’inquiétude et même joie. En grand adepte du stoïcisme, je considérais déjà ma liberté de déplacement et le fait de voir des amis ou non comme indifférent, c’est-à-dire comme ne dépendant pas de moi. Je n’ai donc pas eu de problème de solitude ni d’ennui. J’avais même plutôt, je l’avoue, le moral au beau fixe, car le fait de me trouver seul était l’occasion d’une grande introspection.
Aujourd’hui, je ne suis plus tout à fait dans le même état d’esprit : une inquiétude commence peu à peu à me gagner. Je constate chez les autres étudiants une perte de sens, des douleurs psychologiques, des difficultés financières. Les conséquences de cette crise me préoccupent beaucoup. J’essaye autant que possible de soutenir mes proches, de les appeler et de les aider à prendre de la distance. Là encore, le stoïcisme est précieux. L’intellectualisme permet de comprendre les choses de l’extérieur et de ne pas céder aux passions tristes – comme le désespoir, la crainte, ou la colère. Pourquoi les politiques prennent de telles décisions ? De quoi le virus peut-il nous priver ? Cet effort-là permet de rester serein, de tenir à distance les sentiments négatifs qui pourraient nous entraîner dans un cercle vicieux.
La grande responsabilité qui accompagnait le premier confinement commence aussi à s’évanouir. Ce qui paraissait comme une évidence n’en est plus une, les décisions politiques sont de plus en plus discutées et discutables. Il est difficile de garder en tête l’urgence de la situation, qui nous a vivement mobilisé, sur le temps long. Cette urgence était aussi due à l’impression de faire partie de l’histoire, d’une histoire mondiale. Je me sentais déjà comme citoyen du monde, mais mon cosmopolitisme, d’une posture conceptuelle, s’est présenté pour la première fois comme un devoir immédiat et concret.
S’il est certain que cette crise sanitaire est un événement historique qui va faire date, je n’ai pas encore eu l’occasion de penser au “monde d’après”. À vrai dire, cela me paraît depuis le début comme quelque chose d’assez lointain et vain. L’urgence qui me saisit n’est pas une urgence transformatrice, mais une urgence du devoir. Une urgence d’aujourd’hui, pas de demain. Pour l’instant, je prends acte de ces transformations, toujours en cours. Je penserai à l’après quand tout cela sera terminé. »
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