Pendant que j’y pense / Septembre 2019

Catherine Portevin publié le 2 min

Le billet de Catherine Portevin.

Nous sommes partis, nous voilà rentrés. Sur la route, nous avons suivi le flux giratoire des ronds-points, presque surpris de n’y voir, en guise de gilets jaunes, que celui d’un automobiliste en panne. Et voilà que nous tombons, en ouvrant le premier livre sur la pile des essais de la rentrée, sur cette phrase : « Nous tournons en rond la nuit et nous sommes consumés par le feu ». C’est la traduction d’une citation latine, « In girum imus nocte et consumimur igni », qui fut le plus célèbre titre palindrome du situationniste Guy Debord. Quel rapport entre la critique de l’aliénation dans la société du spectacle et le mouvement des « gilets jaunes » qu’on a dit apolitique ? Il faut être savant et intuitif comme l’est c pour en trouver un en intitulant In Girum son stimulant essai sur « les leçons politiques des ronds-points » (La Découverte, 144 p., 11 €). S’il désigne d’abord le lieu nodal des « gilets jaunes », il pose surtout une autre question : lors de cette mobilisation sans porte-parole pour lui donner un sens unique, qui a tourné en rond ? Qui s’est consumé ? Pas tant les manifestants que les chercheurs, politiques, journalistes, dont les catégories d’analyse de ce qu’il est convenu d’appeler « le mouvement social » ont tourné à vide devant l’inédit. C’est toute une pensée de gauche qui a été « destituée » par une exigence étrangère à sa tradition : contre « l’ab­straction de la politique », contre les idées quelles qu’elles soient. La politique, désormais, n’existera qu’ancrée dans l’expérience de la vie concrète, qu’il faut donc apprendre à décrire. Laurent Jeanpierre interroge cette « repolitisation du local » et « relocalisation de la politique », dont l’échelle, et le projet, pourraient être « les communes ». Quant au feu auquel nous nous brûlons les ailes, il est sans nul doute celui de la catastrophe écologique.

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