Patrick Michel : “Pour la première fois, l’humanité va changer le mouvement d’un corps céleste naturel dans l’espace”
Pour la première fois de notre histoire, un objet extérieur à la Terre verra sa trajectoire déviée par une action humaine. Nous avons demandé à Patrick Michel, directeur de recherches au CNRS, Observatoire de la Côte d’Azur, et l’un des principaux instigateurs de la mission Dart, ce que celle-ci représente.
Le 24 novembre 2021, une fusée Falcon a décollé de la base Vanderberg (États-Unis) emportant à son bord un satellite – un impacteur – qui a pour objectif final d’entrer en collision avec un petit astéroïde de notre système solaire, afin de vérifier les conditions de déviation de sa trajectoire. C’est un événement métaphysique ?
Patrick Michel : Oui, sans aucun doute. Pensez que nous sommes passés d’une ère d’exploration de continents terrestres à une exploration à des millions ou des dizaines de millions de kilomètres. Cela ne paraît pas aussi spectaculaire que le lancement du premier Spoutnik en 1957, mais il y aura un avant et un après. Pour la première fois, l’humanité va changer le mouvement d’un corps céleste naturel dans l’espace. C’est un geste sans précédent. Mais de mon point de vue d’astronome, c’est un geste physique avant d’être métaphysique !
Il est motivé par une inquiétude. La Terre est-elle menacée d’une collision avec des objets spatiaux importants ?
Si l’on s’en tient aux gros astéroïdes dits géocroiseurs, c’est-à-dire susceptibles de passer tout près de ou croiser l’orbite terrestre, aucun ne risque de percuter notre planète au cours du siècle à venir, non. Quand je dis gros, je veux dire d’un diamètre supérieur à un kilomètre.
Il y en a beaucoup et vous les connaissez tous ?
On estime qu’il existe environ un millier de géocroiseurs d’un diamètre supérieur à 1 km, 90% de ces objets étant déjà répertoriés. La probabilité que l’un d’entre eux menace la Terre est de 1 tous les 500 000 ans. Lorsque leur taille atteint ou dépasse 5 km, la probabilité passe à un événement tous les 20 millions d’années.
L’extinction massive à la fin du Crétacé est-elle liée à un impact de météorite ?
Le cratère de Chicxulub, dans la péninsule du Yucatan au Mexique, a été provoqué par la chute d’un astéroïde de plus de 10 km de diamètre il y a 65 millions d’années. Il y a discussion sur le lien de causalité avec l’extinction des dinosaures, mais il est certain que son impact a au minimum joué un rôle majeur.
D’où viennent les astéroïdes qui nous menacent ?
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