Où va l’écologie ?

Philomag vous propose chaque semaine une sélection d’articles parus dans la presse française et étrangère, rassemblés autour d’une thématique commune. Des articles qui nous ont surpris, questionnés, dérangés. L’occasion de découvrir de nouveaux points de vue sur le monde et les événements qui font l’actualité.

Cette semaine, une question : quel chemin faut-il emprunter pour échapper à la catastrophe climatique ? Si certains, optimistes, affirment leur confiance dans la capacité humaine à inventer les technologies nécessaires pour endiguer la crise que nous avons causée, d’autres soulignent que le problème est plus profond et tient davantage à la manière dont nous appréhendons notre relation à la nature et aux autres vivants. Économique, technologique, politique : la question écologique reste ouverte.

Mark Sagoff et al. : “Un bon Anthropocène exige que l‘être humain emploie ses forces sociales, économiques et technologiques à améliorer la vie des individus”

Pour le collectif à l’origine du récent Ecomodernist Manifesto (qui compte notamment le philosophe américain Mark Sagoff), la réponse à la crise climatique ne peut être ni un retour en arrière, ni un renoncement à la technologie. Elle doit au contraire s’appuyer sur le progrès et l’innovation. « Le découplage du bien-être humain des impacts environnementaux nécessitera un engagement soutenu dans le progrès technologique et l’évolution continue des institutions sociales, économiques et politiques, parallèlement à ces changements. L’accélération du progrès technologique nécessitera la participation active, soutenue et agressive des entrepreneurs du secteur privé, des marchés, de la société civile et de l’État. […] La collaboration internationale en matière d’innovation technologique et de transfert de technologie est essentielle dans les domaines de l’agriculture et de l’énergie » en particulier. Ce grand mouvement d’innovation ne doit pas être dirigé d’en haut : il faut au contraire libérer les énergies créatrices, et les laisser se déployer dans de multiples directions. Une profession de foi optimiste dans les capacités de l’homme à résoudre les problèmes planétaires qu’il a créés.

Robert Zubrin : “C’est la stratégie de la peur mise en place par les opposants au nucléaire, motivés par l’ignorance, l’idéologie ou les intérêts, qui nous a privés des immenses avantages qu’offre l’énergie atomique”

Dans une série en trois parties publiée sur le site américain Quillette, l’ingénieur aérospatial et essayiste Robert Zubrin interroge un point particulier de ce solutionnisme technologique : l’énergie. « Comment pouvons-nous obtenir une énergie propre ? » Pour lui, la seule issue viable est celle, très polémique, du nucléaire. Et de balayer de la main, en mobilisant différentes données chiffrées, l’argument des risques : « L’énergie nucléaire est sûre. Près d’un millier de réacteurs […] fonctionnent ou ont fonctionné sur terre et sur mer au cours des sept dernières décennies sans causer de dommages à un seul individu. Aucune autre source d’énergie majeure n’a un bilan de sécurité comparable […] De plus, le nucléaire est propre et illimité. » De quoi relancer un débat qui, en France, tiraille en particulier la gauche, entre communistes pro-nucléaire et « insoumis » contre.

Falk Van Gaver : “Il faut inventer d’autres façons de vivre avec les animaux, sauvages bien sûr, mais également domestiques et familiers, et penser une véritable zoopolitique qui permette à tous les être vivants de cohabiter”

Et si la réponse à la crise climatique n’était pas (seulement) une question technique, mais qu’elle dépendait, en amont, d’un changement dans le rapport que nous entretenons avec le monde ? C’est ce qu’affirme l’essayiste Falk Van Gaver dans un entretien accordé au site Le Comptoir. Il souligne en particulier l’urgence de transformer notre rapport aux autres vivants : « Je ne vois pas comment on peut être sérieusement écologiste aujourd’hui sans prôner non seulement l’abolition totale de l’élevage industriel et de la pêche industrielle, mais aussi de la chasse, de la pêche et de l’élevage en général, ou du moins [réclamer] des restrictions telles qu’elles confinent à leur quasi-disparition ou leur maintien sur un mode exceptionnel et rare […] C’est une question de principes, d’éthique, de morale », qui appelle une réponse politique : l’anarchisme. « L’anarchisme poussé au bout tend à l’écologisme, en défendant une solidarité avec tous les humains, mais également avec les autres vivants. Il y a un lien historique, dès le XIX^e siècle, entre l’émergence des courants anarchistes et écologistes, ou plutôt “naturiens” ou “naturistes” comme on disait alors, et aussi végétariens et autres “légumistes”. »