Le “Traité sur la tolérance” de Voltaire, large succès dans les librairies
Le Traité sur la tolérance de Voltaire s’arrache en librairie depuis les attaques terroristes qui ont meurtri la France entre le 7 et le 9 janvier dernier. Il arrive juste derrière Soumission – le roman de Michel Houellebecq tiré à 150000 exemplaires, déjà épuisé et en tête des ventes cinq jours après sa parution, deux jours avant l’attentat qui a visé la rédaction de Charlie Hebdo.
La progression remarquable des ventes du Traité sur la tolérance, largement cité lors des semaines passées, a été confirmée par la maison d'édtion Folio-Gallimard, laquelle a tiré l’ouvrage à 120000 exemplaires dans la collection « Folio 2 euros » en 2003. « Nous avons constaté une hausse très sensible des ventes de cet ouvrage depuis les attaques, et encore plus depuis la marche de dimanche, au point que nous prévoyons une réimpression de 10000 exemplaires », a expliqué la porte-parole de l’éditeur, mardi 13 janvier 2015. « Il est possible qu'elle soit suivie par d'autres réimpressions ».
Affaire Calas
C'est avec le Traité sur la tolérance que Voltaire gagne les galons d’intellectuel engagé, qu’il incarne désormais pour la postérité. Il l’écrit en 1763 en réaction à l’affaire Calas, du nom de ce commerçant protestant accusé d’avoir assassiné son fils (qui s’est suicidé) afin d'éviter que ce dernier ne se convertisse au catholicisme. Jean Calas est torturé, puis brûlé vif.
Voltaire voit d’abord en lui un religieux fanatique, avant prendre vigoureusement sa défense. Ses cibles? Les dévots fanatiques de tous bords. Le philosophe plaide pour le respect des croyances; théiste, il croit en Dieu et en une religion première non défigurée par la superstition et les dogmes de l'Église. Mobilisant l’opinion, il obtient la réhabilitation de Jean Calas en 1765.
Esprit philosophique
Voltaire poursuit dans l’Avis au public sur les parricides imputés aux Calas et aux Sirven publié deux ans plus tard: « Craignons toujours les excès où conduit le fanatisme. Qu’on laisse ce monstre en liberté, qu’on cesse de couper ses griffes et de briser ses dents, que la raison si souvent persécutée se taise, on verra les mêmes horreurs qu’aux siècles passés ; le germe subsiste : si vous ne l’étouffez pas, il couvrira la terre. »
Comment répandre l’esprit de tolérance ? « Voltaire apporte deux réponses, comme le montre Ghislain Waterlot dans le dossier que nous consacrions à l’auteur. La première : en diffusant les Lumières par le moyen d’écrits percutants, car “il faut être très court et un peu salé” pour être lu du public [À Moultou, 1763]. La seconde : en exerçant une influence sur les politiques. Un des rôles du “despote éclairé” est d’introduire l’esprit de tolérance dans le peuple et même de favoriser le théisme. À la différence de Locke, qui veut établir par la tolérance une liberté des Églises tant qu’elles ne se mêlent pas de politique, Voltaire tend à un contrôle du religieux par le politique : les Églises encouragent le fanatisme par le zèle qu’elles suscitent, et elles aveuglent les esprits. Sans forcer les gens, l’idéal serait de tolérer leurs croyances mais de les rendre disponibles à “l’esprit philosophique” en limitant leur dépendance à l’égard des Églises. »
Il est à craindre, comme l’actualité le rappelle tragiquement que cet « esprit philosophique » ne soit pas encore unanimement répandu. Puisse cependant l’engouement pour le Traité sur la tolérance donner des idées et rendre « disponibles » les esprits... Vœu pieux?
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