François Galichet. La liberté et la mort
Ce professeur émérite de philosophie à l’université de Strasbourg est aussi un homme d’engagement. Depuis presque dix ans, il milite pour le droit à mourir dans la dignité, aidant ceux qui le souhaitent à se procurer la substance fatale en toute illégalité. Un choix qui lui vaut aujourd’hui d’être mis en examen mais qu’il fonde sur des convictions éthiques.
Dates clés
1943 Naît en Haute-Savoie et passe son enfance à Limoges
1962 Intègre l’École normale supérieure de la rue d’Ulm, à Paris, en philosophie
1969 Devient assistant de philosophie à l’université d’Alger
1989 Nommé professeur à l’université de Strasbourg
1992 Soutient sa thèse de philosophie, L’Individu et la Mort
2012 Rejoint l’association Ultime Liberté après avoir été membre pendant plus de dix ans de l’Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD)
2020 Fait paraître Qu’est-ce qu’une vie accomplie ? (Odile Jacob)
De la mort... « il n’y a rien à dire ». Elle est l’Autre inaccessible, l’altérité absolue – rien, pas même le langage, ne peut s’en approcher. Cet avertissement, c’est le philosophe Vladimir Jankélévitch qui le lance dans La Mort (1966). Mais l’écrire, c’était déjà un peu l’enfreindre, dire l’indicible, croquer du fruit que l’on a soi-même interdit. À la sortie du livre, ce geste paradoxal séduit François Galichet, alors jeune étudiant en philosophie à l’École normale supérieure (ENS), qui suit les cours de Jankélévitch à la Sorbonne. Ce mystère de la mort le marque, et il songe à en faire sa thèse. Cinquante ans plus tard, une vie s’est écoulée. François Galichet est aujourd’hui âgé de 78 ans, et, s’approchant de la mort, il a voulu donner à sa pensée l’épaisseur d’un engagement. Membre de l’association Ultime Liberté, qui milite pour le droit au suicide assisté, il est mis en examen pour avoir aidé des personnes souhaitant mourir à se procurer du pentobarbital, un barbiturique mortel à hautes doses.
La première fois que nous parlons ensemble, c’est, pandémie oblige, par téléphone. Je lui demande comment un professeur de philosophie émérite de l’université de Strasbourg s’est retrouvé mis en cause pour (entre autres) « propagande en faveur de produits permettant de donner la mort ». Son ton est apaisé pour quelqu’un qui a connu une perquisition de la gendarmerie à 7 heures du matin, suivie de quarante-huit heures de garde à vue. « J’estime que notre devoir moral vaut plus que la loi », répond-il. Les autres membres de son association et lui reçoivent des appels de personnes en détresse, qui souffrent de vivre mais ne peuvent mourir. Ils ont pris la décision de leur porter secours en les aidant à se procurer cette potion létale, « indolore », assure-t-il, et qui tue en quinze minutes. Mais avant, ils s'assurent que leur volonté de mourir est « délibérée », rationnelle et non soumise à la pression de l’entourage. Pour lui, laisser la liberté de mourir à quelqu’un dont la vie n’est qu’une interminable chaîne de douleurs doit aller de soi : « Quand notre corps n’est que souffrance, vouloir partir devient un instinct vital, comme retirer sa main du feu si elle brûle. » C’est donc d’abord par urgence éthique que le philosophe est entré dans l’illégalité.
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