Conseil n° 14. Tombons des nues

L’histoire de Jésus est incroyable. Un garçon dans la force de l’âge, la petite trentaine, élancé, sportif, pas bête… Les cheveux au vent, la barbe de trois jours, décontracté… En plus de ça, sympathique, séduisant, doux, brillant. Alain Delon à côté de lui, c’est Paul Préboist ! 

Et non seulement ça, mais d’une habileté inouïe. Un prestidigitateur d’une virtuosité indépassable, capable de faire des tours ahurissants, multipliant les petits pains, transformant l’eau en vin, marchant sur l’eau… Et puis, surtout, capable de réapparaître plus vivant que jamais trois jours après avoir été crucifié, une couronne d’épines sur la tête. Mieux que la malle des Indes ! Mieux que la femme coupée en deux ! David Copperfield à côté de lui, c’est Garcimore !

C’est bien simple, rien qu’en pensant à Jésus-Christ, on a inventé le mot « christique », comme plus tard on a inventé « gaulliste » en référence au général, ou « dupontaignaniste » en référence au particulier. (Vous ne trouvez pas qu’il est un peu particulier Dupont-Aignan ?) 

Toujours est-il que l’histoire de Jésus n’a jamais été mise en doute par les prêtres de l’Église catholique. Pourtant, quand on y pense, c’est rare les gars crucifiés qui ressuscitent. 

« Sans déconner, monsieur le curé, vous y croyez vraiment à l’histoire de la résurrection ? » 

Si vous avez le malheur d’être un peu défiant, voire légèrement dubitatif, vous vous faites salement remettre à votre place. 

« Enfant de Satan ! Impie ! Mécréant ! Comment oses-tu remettre en cause la parole de Dieu ? Tu seras damné et mourras en enfer ! » 

Bon, ne vous énervez pas, monsieur le curé, je posais juste une question… C’est vrai qu’à force de lire des infox sur Internet, on finit par devenir forcément un peu méfiant. On ne peut pas tout prendre pour argent comptant. Il y a tellement de malfaisants qui s’amusent à manipuler un public un peu fragile sur les réseaux sociaux.

Ce qui est beau, monsieur le curé, c’est comment vous avez réagi au moment où le rapport Sauvé a été rendu public. Vous êtes tombé des nues. Vous ne pensiez pas que ça avait pris de telles proportions. 

C’est marrant : l’histoire de Jésus qui a plus de deux mille ans, vous ne l’aviez jamais remise en cause, et l’histoire de tous ces petits souffre-douleur violés, abusés, qui depuis pas mal d’années tentaient de se faire entendre, vous n’arriviez pas y croire. Vous trouviez ça abusif quand des petits martyrs se disaient abusés. 

Vous aviez la crédulité partiale.

Tombons des nues, monsieur le curé.

C’était si agréable, pourtant, de s’élever au-dessus de la réalité, de voyager dans l’allégorie, de tutoyer les étoiles, d’enlacer la légende, d’étreindre son rêve, d’embrasser ses chimères…