Vivre avec ChatGPT

ChatGPT est le résultat d’un processus multimillénaire de mathématisation du monde et de la pensée. Et ce modèle de langage est voué à s’étendre, de l’analyse de marché au marketing, en passant par le journalisme et les professions juridiques. Pour le critique littéraire Alexandre Gefen, il est déjà temps de tirer parti de Chat-GPT. Il s’y essaye au fil d’un essai rythmé par des échanges avec le robot. Les réponses sont parfois drôles, décevantes ou brillantes, comme quand il répond à la question : « Mon chat, comment expliquer à mon fils de 3 ans la relativité générale ? », dévoilant le potentiel de cet outil pour les pédagogues, notamment grâce à ses analogies fines et à ses exemples pertinents. En universitaire pragmatique, l’auteur utilise Chat-GPT pour « synthétiser des arguments complexes en anglais » ou « écrire une lettre de refus aimable à un collègue sympathique ». Et nous devrions tous faire de même. Beaucoup bénéficieraient d’une « appropriation à un coût modeste du pouvoir de conviction, voire simplement l’accès à un langage de bon niveau ». L’écrivain David Jhave Johnston compose bien ses poèmes à l’aide de neurones artificiels. Mort de l’auteur ? Pas plus que quand les structuralistes suggéraient que créer, c’est simplement s’insérer dans des structures linguistiques préexistantes. Gefen parcourt ces grandes questions philosophiques mais appelle enfin à une « cohabitation critique » avec ChatGPT : ne pas oublier son emprise économique, l’exploitation des travailleurs du clic qu’elle implique, de même que la captation massive des données et la dose de conformisme tiède qui irrigue de plus en plus les réponses générées.