Inédits. Vol 2. Conférences en Amérique, notes de cours et autres textes 

Une recension de Octave Larmagnac-Matheron, publié le

Disons-le d’emblée, ces deux volumes d’inédits de Maurice Merleau-Ponty ne s’adressent pas à tout le monde. Ils intéresseront certainement quelques étudiants et chercheurs très aguerris à la pensée du phénoménologue. Mais pour les autres ? Que faire de ces centaines de pages précédées de (trop ?) longues introductions où s’égrènent, de manière parfois décousue, les notes, les brouillons, les ratures, les réécritures, les textes de conférence ? Comment donc s’y repérer ? Peut-être, précisément, en se laissant porter, en vagabondant dans les linéaments de cette pensée en train de se faire. Au détour un peu hasardeux d’une page, quelques fulgurances attendent le lecteur. Dans le second volume, alors que Merleau-Ponty tisse les fils apparemment disjoints de la sensibilité (explorée dans la Phénoménologie de la perception) et de la politique (au cœur d’Humanisme et Terreur), comme pour en montrer l’intime et indémêlable solidarité au sein d’une dimension signifiante où nos existences s’insèrent, surgit soudain l’idée, puissante, de « perception de l’histoire ». Voulant montrer l’« impossibilité d’une objectivité absolue en histoire » (car « valeurs et faits [sont liés] dans une perception de l’histoire »), soucieux aussi de remettre à leur place les « dogmatismes » qui décrètent de l’extérieur un sens de l’histoire, Merleau-Ponty souligne que « l’histoire n’a pas un sens. Nous le lui donnons ». Ce sens « dépend de ce qui suivra ». L’appréhension que nous avons de notre héritage est constamment modifiée par la transformation de notre projection dans l’avenir. « Il y a va et vient et compréhension de notre avenir par notre passé comme de notre passé par notre avenir. […] La constitution du passé dépend de notre présent et du choix de notre avenir. Nous nous choisissons des ancêtres. L’histoire n’est pas science parce qu’elle est nous. » Nous réinterprétons sans cesse notre inscription en elle. Ce sens dynamique ne peut jamais se réduire à un discours univoque. « Il n’y a pas une vue mais une pluralité de perspectives » qui s’enroulent et s’affectent les unes les autres. Un exemple de ces saillies lumineuses émaillant les volumes, caractéristique des préoccupations du philosophe dans ces premières années de l’après-guerre.

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