“Y a-t-il une limite à l’imagination ?”
Question de Tevaiarii Metua
L’imagination a longtemps été pensée comme illimitée, comme l’échappatoire idéal pour un esprit enfermé dans le carcan étroit de la raison. Pourtant, il n’est pas certain que nous imaginions si loin que cela. D’après Descartes, imaginer revient simplement à associer de manière fantaisiste des éléments connus. Si l’on vous demande d’imaginer la chose la plus folle que vous puissiez concevoir, vous risquez de répondre quelque chose comme : Emmanuel Macron en visite officielle sur Mars, un éléphant rose volant au-dessus de Paris, un être sublime tombant du ciel dans votre lit. Or vous connaissez Emmanuel Macron, vous savez ce qu’est une visite officielle et vous savez aussi que Mars existe… De même, vous connaissez des éléphants, la couleur rose et Paris. En imaginant, vous ne vous êtes donc pas envolé si haut que vous le croyiez : vous avez fait du neuf avec du vieux, votre imagination étant limitée par les données de votre expérience, que vous vous êtes contenté d’assembler de manière originale. De plus, quand on observe l’œuvre des grands artistes, on remarque souvent la récurrence d’un thème autour duquel tout leur travail semble tourner : certains écrivains réécrivent toujours le même livre, certains réalisateurs mettent sans cesse en scène la même obsession. Leur imagination semble alors limitée par ce que Lacan appellerait leur « affaire », et c’est probablement une bonne nouvelle pour leur art : ils sont tenus par ce qui les hante, la nécessité d’y revenir toujours, et non libres d’imaginer n’importe quoi. Quand je lis Patrick Modiano, je suis heureux de rencontrer la limite de son imagination : j’aime qu’il bute sur les mêmes nœuds, sans lesquels il ne serait pas l’écrivain qu’il est. Kant montre enfin que c’est par notre raison, et non par notre imagination, que nous pouvons nous élever au-dessus de l’expérience sensible pour envisager l’infini. Il nomme « idées de la raison » ces objets que nous n’avons jamais rencontrés dans l’expérience, mais en lesquels nous sommes libres de croire : le moi, le monde, Dieu. Même si le pouvoir de l’imagination reste grand, même s’il peut être mis au service d’une obsession ou d’une nécessité intérieure, le pouvoir de la pensée est peut-être plus grand encore.
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