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 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
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© Pawel Szvmanski/Unsplash

Vive la myopie !

Clara Degiovanni publié le 10 novembre 2022 2 min

Hier, pendant quelques minutes, Clara Degiovanni a contemplé un paysage mystique. Son champ de vision s’est transformé en un vaste puits lumineux rouge, jaune et blanc. L’atmosphère est devenue trouble et cotonneuse. Pendant quelques secondes, Paris a changé de couleur et de texture.

 

« Pour voir le paysage décrit ci-dessus, j’ai simplement ôté mes lunettes. C’est sans doute un détail pour vous, mais pour moi cela signifie voir avec -4,50 et -4,75 de dioptrie, ce qui, chez l’ophtalmo, me vaut une note de moins de 1/10. La plupart du temps, cette myopie plutôt sévère m’est pénible. Mais parfois, elle a quelque chose d’apaisant. Peut-être que les myopes qui me lisent – c’est le cas de 40% des Français, selon l’OMS – se reconnaîtront dans ce témoignage.

J’aime être myope pour la douceur des matins flous. Quand je me lève, j’ai l’habitude de passer quelque temps sans mes lunettes, pour apprivoiser la journée, m’acclimater à cet état d’éveil. La lumière de ma lampe est alors étalée et estompée par ma vue défaillante, un peu comme un mini-soleil. Les couleurs s’entremêlent, les contours se diffusent. Aux prémices de la journée, dans ce moment de flottement et d’indécision, ma condition de taupe me paraît plutôt agréable. L’instant où je mets mes lunettes signale le début de la journée. J’entre alors dans le monde clair et net : celui des affaires quotidiennes, du travail et du sérieux.

C’est pourquoi j’aime aussi être myope en fin de journée, dans le métro, quand l’environnement me surcharge de signaux et d’informations. Ôter mes lunettes devient une sorte de super-pouvoir. D’un geste, je peux me couper du monde. Je ne vois plus les panneaux publicitaires et les slogans. Plus rien ne m’atteint ni ne m’appelle ! En floutant les choses, la myopie les éloigne de moi. “À mesure que mon horizon s’élargit, les images qui m’entourent semblent se dessiner sur un fond plus uniforme et me devenir indifférentes”, écrit Henri Bergson dans Matière et Mémoire (1896). C’est, je crois, cette douce indifférence que permet le flou : il compose pour moi un horizon lointain, vaporeux et uniforme.

Je m’interroge donc sincèrement : vous qui voyez clair tout le temps, comment faites-vous pour supporter la dureté des contours quand vous sortez à peine du sommeil ? Et le soir, ne vous sentez-vous pas un peu fatigué par cette abondance de stimuli ? Si la vue nette est parfois épuisante, c’est parce que “les objets qui entourent mon corps réfléchissent l’action possible de mon corps sur eux”, nous dit Bergson. Autrement dit, nous entretenons un rapport instrumental à ce que nous percevons distinctement. Cette fleur que je repère, je suis déjà en train de la cueillir. Cet objet publicitaire devant moi, je le possède en pensée. À l’inverse, ce que je vois trouble se dérobe à mon action et à ma volonté. Quand il n’y a plus de détails, tout devient paysage. Et le monde prend soudain un charme flou. »

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