Travailleurs du sexe
En se déclarant favorable à l’abolition de la prostitution, la ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, relance le débat sur le statut de ceux qui exercent cette activité.
Les faits
Rappelons que l’expression « travailleurs du sexe » (sex workers), forgée aux États-Unis en 1978 par Carol Leigh, ex-prostituée, revendique l’existence d’une industrie du sexe, où les prostitués devraient être reconnus comme acteurs d’une transaction commerciale, au lieu d’être réduits à un statut d’objet.
Abolir la prostitution : sitôt cet objectif annoncé par la ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, deux camps sont montés au créneau. D’un côté, des prostitué(e)s, qui se définissent comme des « travailleurs du sexe » – à l’instar des acteurs de films X – et réclament la reconnaissance juridique de leur activité et sa réglementation dans le cadre du droit du travail. Ils défendent la politique réglementariste, adoptée aux Pays-Bas (2000) et en Allemagne (2002) : la prostitution y est encadrée et reconnue comme une activité professionnelle totalement licite, au nom de la libre disposition de son corps et du principe de libre entreprise. De l’autre, des associations féministes, favorables à l’abolition de la prostitution, symbole de la domination masculine, s’apparentant à un esclavage sexuel. À la différence du prohibitionnisme (en vigueur à peu près partout aux États-Unis), l’abolitionnisme consiste à pénaliser les clients et les proxénètes, mais pas les prostitué(e)s, considérés comme des victimes. C’est la position de la Suède depuis 1999, imitée par la Norvège et l’Islande, et peut-être bientôt par la France : rompant avec la tradition de tolérance à l’égard de la prostitution, une résolution pour « en finir avec le mythe du plus vieux métier du monde », résolument abolitionniste, a déjà été votée en ce sens à l’Assemblée nationale en décembre 2011. Mais aux yeux des « travailleurs du sexe », interdire la prostitution reviendra seulement à la déplacer vers des endroits plus discrets (comme en 2003, lorsque le délit de racolage passif a été instauré), entraînant précarisation et risques sanitaires accrus. Face à des conceptions aussi discordantes, la « conférence de consensus » prévue par Najat Vallaud-Belkacem tiendra-t-elle ses promesses ?
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