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 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
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(cc) Norman B. Leventhal / Flickr

Tour du monde des bonheurs philosophiques

Anne-Sophie Moreau publié le 24 septembre 2012 16 min

L’économiste Jean Gadrey s’est livré à de savants calculs afin de déterminer des indicateurs de félicité selon cinq grands théoriciens d’Occident : Aristote, Épicure, Épictète, Descartes et John Stuart Mill. On apprend que la France est moins cartésienne que les pays du Nord, que le Japon est un modèle d’épicurisme, tandis que l’Amérique du Sud affiche un stoïcisme à toute épreuve. La méthode est originale, l’exercice contestable, les résultats amusants. Panorama des pays où il fait bon vivre.

Mesurer le bonheur : oui, mais lequel ? Les experts rivalisent d’ingéniosité pour forger leurs statistiques, mais négligent parfois l’objet même de leurs calculs. Nombre des études récentes mélangent données subjectives et objectives pour mesurer un bien-être dont la définition est tenue pour évidente. Pourtant, chez les philosophes, l’idée même de vie heureuse est loin de faire l’unanimité. Plénitude, ataraxie, souverain bien ou béatitude, le bonheur philosophique est multiforme. À partir de quelques-unes des principales conceptions du bonheur qui s’affrontent dans l’histoire de la pensée, nous avons proposé à l’économiste Jean Gadrey d’imaginer des « contre-indicateurs », ou encore des mesures des différents niveaux de bonheur philosophique dans 28 pays. L’exercice est périlleux et les résultats ne sont pas à lire au premier degré ! Cet usage peu orthodoxe des classiques montre néanmoins que pour quantifier le bien-être, il faut s’entendre sur les critères retenus. Car, selon l’échelle de valeurs, les classements divergent. Avant de choisir votre coach, exigez son diplôme. Si vous tombez sur un stoïcien, vous risquez de faire des pompes sous un portique colombien. Alors que vous auriez préféré, en bon aristotélicien, faire vos humanités à l’université de Copenhague.

 

À propos de la méthode

À la demande de Philosophie magazine, Jean Gadrey, professeur émérite d’économie à Lille-1, a accepté de construire des indicateurs d’un genre nouveau, afin de mesurer les niveaux de bonheur philosophique dans 28 pays. Une méthode originale, contestable mais stimulante.

Quelle méthode avez-vous suivie pour élaborer ces indicateurs ?

Jean Gadrey : Après avoir repéré les principaux critères de bonheur dans les écrits de chacun des philosophes retenus, j’ai cherché dans les bases statistiques internationales si des indicateurs pouvaient refléter ces critères. Par exemple, si la santé est un critère de bonheur, on pensera à l’espérance de vie. Mais si on insiste sur l’accès de tous à la santé, on pourra y ajouter l’importance des dépenses publiques de santé.

Ensuite, j’ai converti, pour chaque indicateur, les chiffres des différents pays en notes de 0 à 10 – 0 correspondant à la moins bonne performance dans l’éventail des 28 pays retenus (par exemple, 47 ans pour l’espérance de vie en Afrique du Sud) et 10 à la meilleure (82 ans au Japon). Entre les deux, j’ai effectué une règle de 3.

On peut alors faire comme si chaque pays passait un examen à épreuves multiples (les divers critères du bonheur) devant chaque philosophe, ce dernier effectuant la somme des notes sur 10 pour les critères qui lui importent, quitte à mettre des « coefficients » si certains critères sont plus décisifs. Cette note globale est ensuite située sur une échelle de 0 à 100.

Il est apparu pertinent et plus lisible de procéder a posteriori à des regroupements de pays (anglo-saxons, nordiques, etc.) plutôt que de fournir des graphiques très chargés pour chacun des 28 pays. Bien sûr, à l’intérieur de chaque groupe, les « performances » peuvent différer sensiblement.

Quels sont les présupposés et les biais introduits par ces mesures ?

L’exercice est l’un des plus risqués qui soit dans l’état actuel des statistiques mondiales. Il a au moins trois limites. Premièrement, plusieurs indicateurs reflètent imparfaitement « l’idée à mesurer » ou bien sont ambigus. Le fait qu’un pays connaisse la paix est-il bien traduit par le faible niveau de ses dépenses militaires ? Certains objecteront que ces dépenses sont préventives. Mais de fait, on constate que les pays où ces dépenses sont les plus élevées sont souvent les plus engagés dans des conflits. Deuxièmement, la méthode de normalisation (« noter » de 0 à 10 chaque indicateur) masque le fait que les disparités peuvent être fortes pour certains (de 3/1 000 à 62/1 000 pour la mortalité infantile) et plus faibles pour d’autres (de 3,3 à 7,7 % du PIB pour les dépenses publiques d’éducation). Troisièmement, certaines notions ne supportent pas la quantification. Comment mesurer la vertu ? La contemplation ? Une vie frugale ? Tout ce qui compte ne peut pas aisément être compté. Ces limites sont fortes. Ôtent-elles sa crédibilité à l’exercice ? Je ne le crois pas, mais chacun jugera.

Cette démarche est-elle stimulante, aujourd’hui, pour un économiste ?

Il y a un intérêt croissant chez les économistes et bien au-delà (même l’OCDE et l’Union européenne s’y mettent) pour ces indicateurs alternatifs. Chacun s’accorde toutefois à reconnaître qu’ils reposent sur des « systèmes de valeurs ». Le passage par la philosophie peut éclairer le débat sur les valeurs en présence et contribuer à des mesures plus réflexives.

 

 

Aristote. La contemplation au cœur de la cité tranquille

Définition. « L’activité purement spéculative, ou contemplative, est ce qu’il y a de plus éminemment propre à la nature d’un être doué de raison et d’intelligence : c’est donc dans l’exercice d’une telle activité qu’un tel être doit trouver le bonheur. » Pour Aristote, l’homme, contrairement à l’animal, ne saurait se contenter du plaisir physique. Un bon repas, une santé de fer sont des biens précieux. Mais vous avez tort de les préférer à une séance de méditation ou à une bonne action. Car la satisfaction de vos désirs corporels n’est qu’un moyen en vue d’une activité plus parfaite. Vous trouvez que réfléchir à l’origine de l’Univers ne sert à rien ? Vous avez raison. C’est précisément parce que la contemplation de la vérité n’a d’autre fin qu’elle-même qu’Aristote en fait la jouissance suprême. De même, si « l’animal politique » qu’est l’homme a besoin de vivre en communauté pour être heureux, c’est en vue de son accomplissement par la vertu. Rien ne vaut un pays en paix, une bonne éducation et un gouvernement équitable pour assurer aux citoyens des conditions de vie propices à la moralité et au « loisir » intellectuel. Autrement dit, vous ne travaillez et ne votez aux élections présidentielles que pour vous garantir le confort minimal et les infrastructures nécessaires à l’accomplissement du caractère divin de votre humaine nature, qui – non, vous ne rêvez pas – vous attend peut-être à la bibliothèque.

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Article issu du magazine n°14 octobre 2007 Lire en ligne
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