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 Philosophie magazine : les grands philosophes, la préparation au bac philo, la pensée contemporaine
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Divergences

Pourquoi aime-t-on ce qui nous fait du mal ?

Caroline Pernes publié le 11 novembre 2022 3 min

Que ce soit la douleur de l’effort ou la complaisance dans des plaisirs, qui finiront par nous nuire, pourquoi choisissons-nous parfois de nous faire du mal ? Explications de quatre philosophes aux tendances légèrement masochistes.

Parce que nous recherchons le plaisir

Épicure (341-270 av. J.-C.)

Vous tendez la main vers un paquet de bonbons bourré de produits chimiques. Vous avez parfaitement conscience de son effet délétère sur la santé. Pourquoi persister ? Parce que c’est agréable ! Plaisirs de la table, de la chair, du jeu… Ces derniers peuvent parfois constituer notre boussole intérieure. Selon les principes épicuriens, nous devons avant tout chercher le plaisir et éviter les souffrances. Le plaisir permet en effet de « déterminer ce qu’il faut choisir et ce qu’il faut éviter » dans notre vie. Mais Épicure invite aussi à la modération. La satisfaction ne doit pas mener à une vie déréglée, plutôt à l’ataraxie, l’absence de trouble. Ainsi, les plaisirs excessifs sont à éviter « lorsqu’ils doivent avoir pour suite des peines qui les surpassent », et il faut accepter les douleurs « lorsque résulte de là pour nous un plaisir qui les surpasse ». Un savant équilibre à trouver !

Parce que nous aimons la transgression

Saint Augustin (354-430)

En cédant à l’appel de la nicotine, vous êtes conscient que vous mettez votre vie en danger... Mais n’est-ce pas précisément ce qui rend la chose en partie attirante ? C’est en tout cas ce que suggère saint Augustin. L’auteur des Confessions est conscient qu’en se livrant au péché, il s’inflige le mal ultime : compromettre son accès au paradis. Il confesse pourtant avoir volé des poires avec des amis quand ils étaient encore des « mauvais garçons ». Pire : « Notre seul plaisir fut d’avoir commis un acte défendu. » La jouissance n’est pas venue de la dégustation des poires, mais du fait de « faire le mal sans raison ». Il y aurait une joie particulière à la transgression des règles, nous conduisant à choisir le mal en toute conscience, à la manière de saint Augustin : « J’ai aimé ma chute : non l’objet qui me faisait choir, mais ma chute même. » De quoi rendre la rédemption d’autant plus belle, peut-être aussi ?

Parce que nous pouvons nous tromper

Baruch Spinoza (1632-1677)

Comment savoir que quelque chose – ou quelqu’un – nous fait du mal ? Pour Spinoza, il n’existe pas de bien ou de mal en soi, mais simplement des choses qui sont bonnes ou mauvaises relativement à notre nature propre. Comme il le rappelle dans une lettre à Blyenbergh du 19 février 1665 : « Vous vous abstenez de ce que j’appelle les vices parce qu’ils répugnent à votre nature singulière, non parce que ce sont des vices. » On peut ainsi se faire du mal parce que l’on ignore ce qui mauvais pour nous. D’où la nécessité d’expérimenter, et potentiellement, de se tromper : « Personne n’a connaissance d’un poison ou ne peut en avoir sinon qui a vu ou entendu parler de quelqu’un qui s’est condamné en en consommant. » Ainsi, par ignorance, nous pouvons ressentir du plaisir à nous empoisonner, « sans crainte d’être condamnés ». C’est seulement par l’expérience que nous pouvons distinguer entre ce qui est bon et mauvais pour notre nature individuelle, et ainsi ajuster nos conduites au fil de notre existence.

Parce que nous valorisons l’ascèse

Peter Sloterdijk (1947-)

Les visages grimaçants, les muscles tendus, la transpiration des corps… Affalé sur son canapé devant une étape particulièrement corsée du Tour de France, on ne peut s’empêcher de s’interroger : pourquoi tant de souffrance ? « Abandonne ton penchant pour les modes de vie confortables », murmure alors le philosophe Peter Sloterdijk à votre oreille paresseuse. Renonçant à son confort immédiat, le coureur vise un bien futur : la performance. L’ascèse sportive exerce le dépassement de soi, le goût de l’effort, la « verticalité ». Pour Sloterdijk, c’est une traduction déspiritualisée de l’éthique religieuse. Elle est tout sauf une invention moderne ! Avant le corps musculeux que l’on croise dans des cours de fitness, il y avait Hercule, le célèbre héros grec qui « incarne le principe selon lequel on devient un être humain en choisissant le chemin difficile ». S’entraîner à supporter la douleur permet de s’élever vers une nature exceptionnelle… quitte à souffrir excessivement pour y arriver.

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